Après une trêve estivale plus longue qu’à l’ordinaire, au lieu du septembre habituel, c’est le mois de novembre qui accueille aujourd’hui la reprise de nos travaux.
Le prochain colloque de l’automne 2025
Ce léger retard est simplement dû au surcroît de travail d’études et de recherche généré par vos sollicitations et propositions d’actions concernant la position d’Henri Guillemin par rapport à l’injustice sociale, devenue hurlante aujourd’hui.
Cette question, aussi logique que légitime en ces jours, a naturellement fait surgir l’un des fils rouges de l’œuvre d’Henri Guillemin sur ce sujet, à savoir l’invariant de l’Histoire moderne, ce rapport de classe entre dominants et dominés.
Henri Guillemin présentait d’un côté, les « Gens de Biens » Bien avec un « s », son jeu de mot favori pour souligner que le vocable « Bien » n’avait nul rapport avec l’éthique chrétienne, mais avait au contraire pleins rapports nourrissants, forts et durables avec la Richesse sous toutes ses formes et à travers tous les moyens pour la garder, l’accroître, même au prix des pires trahisons et compromissions (exemples historiques : Révolution française, Pétain, La Commune… et toujours de nos jours), et d’un autre côté, les « Gens de rien ou de peu », à savoir la grande majorité des peuples, non seulement dominés et exploités, continuellement dupés et trompés. Clairement les dindons de la farce bourgeoise.
A partir de ce rapport de classe, spécifié de façon lumineuse par Guillemin dans les années 70/80, nous nous sommes posés la question : qu’en est–il en 2024 ? Soit cinquante après ?
Car en 2024, les choses ont fortement changé. Un tour d’horizon sur la situation d’aujourd’hui donne le vertige. Quels sont, aujourd’hui, les nouveaux visages de ces « Gens de biens ». On sait qu’ils participent d’un système transnational, financier, ultra minoritaire et pour autant déterminant. Mais qui sont-ils, où sont-ils en réalité. Quelle est l’histoire de leur domination, d’où viennent ils ? Et comment opèrent-ils ? Quelle est la vraie réalité de l’ultra libéralisme dont ils sont issus ?
De même, dans la société ultra libérale, quels sont les nouveaux mécanismes d’asservissement subis par les Gens de rien ou de peu ? L’appauvrissement des dominés, qui vont des subalternes aux classes moyennes, n’opère pas seulement sur le plan salarial, économique et professionnel. Il travaille aussi en profondeur les domaines intellectuels, culturels, éducatifs, informationnels, sociaux et politiques, en fait, tous les domaines de la vie sociale.
Quelle est la réalité de cette inégalité généralisée ? Comment fonctionne le Silence aux pauvres en 2024 ?
Comme il était impossible de traiter tous ces thèmes en un seul colloque d’une journée, nous avons opté pour la mise en lumière du rapport Gens de Biens/Gens de rien dans le monde du travail, lieu primordial de la société capitaliste, puisque le travail reste le point nodal d’où est issue toute valeur et tous rapports de production, donc de classes.
Pour être complet, il faudrait traiter les autres thèmes, un par un, à travers une série de colloques sur plusieurs années, cinq, six, ce qui formerait œuvre globale. C’est notre intention. Nous verrons.
La sélection des intervenants pour le premier colloque de cette série, celui qui est programmé à l’automne 2025, plus précisément soit début octobre, soit début novembre est en cours et ne peut donc pas encore être dévoilée.
Cependant, en voici l’architecture générale.
Une introduction du président suivie d’une nouveauté : un document vidéo inédit réalisé à partir d’extraits des conférences vidéo d’Henri Guillemin sur le thème du colloque. C’est un défi technique que nous nous sommes lancé et espérons réaliser.
Une matinée d’interventions consacrées à la réalité socioprofessionnelle chez les gens de rien ou de peu ; les victimes de l’ultra libéralisme.
Une après midi consacrée à montrer le vrai visage des classes riches et hyper riches
Une conclusion philosophique ouvrant vers des pistes d’espoir.
On vous tient informés des étapes d’avancement de ce grand projet.
Henri Guillemin à la TV française en 1968 . Une rareté et une pépite ; 1ère partie.
C’est en préparant cet ensemble de colloques que nous avons découvert cette première vidéo : une petite interview d’Henri Guillemin à la RTBF (Radio Télévision Belge Francophone) datant de 1980.
Vous verrez, à 1, 20 mn, répondant à la question du journaliste qui déplore qu’il ne passe pas à la TV française, Guillemin réagit aussitôt en citant une grande émission datant de 1968, dont il fut l’invité. Cette émission fut la dernière car Guillemin fut ensuite évincé de la TV française par Pompidou qui le détestait. Il y reviendra plusieurs dizaines d’années plus tard.
Quelle était cette fameuse émission de décembre1968 ?
Après de longues recherches, nous l’avons trouvée parmi les archives de l’INA. Il fallut ensuite tout paramétrer et mixer le document vidéo pour qu’il soit le plus lisible et audible et en adéquation avec les contraintes technologiques d’aujourd’hui.
Il s’agit d’une émission de trois heures datant de décembre 1968, intitulée « L’invité du dimanche ». Cette émission réunit de très grands noms.
La productrice s’appelle Éliane Victor (1918 – 2017) pionnière à l’ORTF, qui deviendra célèbre et obligera le respect par ses émissions sur les femmes, dont « Les femmes aussi » . Pour en savoir plus sur Eliane Victor, cliquez ici
Le réalisateur s’appelle Raoul Sangla (1930 – 2021). C’est un des très grands réalisateurs du début de la télévision aux côtés de Jean-Christophe Averty, Claude Santelli, Jean Prat ou Stellio Lorenzi. Membre du parti communiste, il fut évincé par Pompidou et ne reviendra à la télévision française qu’après mai 1981 pour y réaliser le mythique « Journal d’en France »
Notons à cette occasion que Jean Chérasse, fidèle adhérent, qui a travaillé avec Guillemin sur ses deux grands films : Dreyfus ou l’Intolérable Vérité (prix Méliès) et La Prise du pouvoir par Philippe Pétain, connaissait très bien Raoul Sangla dont il admirait le talent et la vaste culture.
Pour en savoir plus sur Raoul Sangla, cliquez ici.
Comme l’émission dure trois heures, nous la mettrons en ligne en trois newsletters. Aujourd’hui le premier épisode.
Il est impossible d’imaginer à la télévision d’aujourd’hui, une émission si intense et innovante, tant par son sujet, sa durée, sa mise en scène, que par son écriture proprement cinématographique. A l’époque, la TV était encore un medium d’éducation populaire et d’enrichissement culturel.
Quelques mots de description avant que vous y plongiez.
Incroyable début : sur fond de musique de jazz, d’un gros plan sur les mains d’un contrebassiste, un zoom arrière nous montre le visage barbu du musicien.
Coupe.
Plan suivant sur une sorte de drôle de statue.
Apparaît le titre de l’émission, puis un panoramique vers la gauche capte en gros plan le front de quelqu’un, et bientôt de grosses lunettes noires que les connaisseurs ont déjà reconnues.
Eh oui, c’est Henri Guillemin qu’un zoom arrière conjugué à une montée en plongée, comme une belle arabesque, nous dévoile, debout, accoudé à un piano.
Il a l’air sérieux, concentré sur la musique. Il est là, tout seul, comme dans un bar américain.
La caméra continue de peindre par ses panoramiques, travellings et ouvertures de champ. De haut, elle nous fait maintenant découvrir le plateau de l’émission. D’abord les autres musiciens, puis une estrade pour le futur entretien avec Guillemin qui est filmé de profil, de trois quart dos (images inédites de lui puisque c’est toujours de face qu’on le voit à travers ses conférences vidéo), puis, surprise, apparaît dans le champ trois types en train de discuter debout en fumant près des coulisses.
Et là, on est obligé d’être intrigué, car ils regardent Guillemin qui, à l’opposé, est resté seul, accoudé au piano et dont certains plans rapprochés montrent qu’il a entamé une intense discussion avec le pianiste.
Il ne se passe rien d’autre, juste l’alternance de plans entre Guillemin « au piano » et, à l’autre bout du plateau, les trois gaillards que le son nous apprend qu’ils discutent de…… Guillemin.
Incroyable scène, incroyable ambiance qui va durer un petit quart d’heure ! Car ce n’est qu’à la douzième minute passée que l’animateur vient enfin vers Guillemin pour le saluer (plan séquence génial à partir de 12’ 41) et l’entraîner lentement vers l’estrade où l’on pense qu’enfin un débat va s’ouvrir.
Eh bien non ! Pas encore !
Mais arrêtons là pour vous laisser la surprise de la suite qui commence très fort à la seizième minute : Guillemin sur scène. La passion faite homme. Son plaisir gourmand. Un showman exceptionnel.
Celles et ceux qui ont assisté aux conférences de Guillemin jubileront.
L’émission dure trois heures. Trois heures de plaisir teinté de nostalgie. Nous la diffusons en trois fois une heure.
Aujourd’hui, le premier épisode.
Bon visionnage.
NB. L’équipe qui anime l’association réunit une poignée de camarades. C’est l’un deux, Michel Le Thomas, dont la carrière comme producteur et réalisateur lui a permis de travailler avec des pointures comme René Vautier (1928 – 2015), qui a trouvé ce document précieux et l’a remis aux normes techniques. Pour en savoir plus sur lui et ses réalisations, cliquez ici.
Prochain épisode, 2ème partie de l’émission : début décembre prochain.