Catégories
Uncategorized

L’écho permanent de nos colloques aujourd’hui

La réédition en format poche, donc visant un grand public, de l’ouvrage Industriels et banquiers français sous l’occupation de l’historienne Annie Lacroix-Riz, peut objectivement, surtout aujourd’hui, être considéré comme un événement éditorial.

Comme nous l’avons toujours fait pour les ouvrages des intervenants qui furent publiés à la suite de nos colloques, nous diffusons aujourd’hui l’information concernant la nouvelle parution d’un ouvrage qui s’inscrit en droite ligne dans le thème de notre colloque du 17 novembre 2018 sur le thème « Pétain, montée du fascisme, débâcle de 1940, collaboration« . (ex : « Veni, Vidi, Vichy…et la suite« . Pour en savoir plus, cliquez ici)

Couverture de l’édition poche. 1224 pages ; 13,90 €

En effet, il s’agit de la troisième réédition en format poche des œuvres maîtresses de l’historienne Annie Lacroix-Riz, commandée par son éditeur Armand Colin.

Commandée ? Un vocable particulier qui induit immédiatement chez l’historienne la nécessité, voire l’obligation épistémologique de dire une vérité renouvelée, cette vérité au plus près des faits, des preuves, des archives, nouvellement travaillés.
Et des nouvelles sources archivistiques, il y en eut !

C’est à travers cet impératif de vérité historique, visant à permettre l’émergence d’une conscience politique, que se développent les travaux d’Annie Lacroix-Riz qu’ont peut considérer comme la constitution d’une œuvre globale.

La non-épuration en France : De 1943 aux années 1950.

Couverture de l’édition poche ;
792 pages ; 12,90 €
Maurice Papon, ancien fonctionnaire de Vichy, faisant un baisemain à Simone Veil, rescapée des camps. Photo prise le 5 avril 1978 devant le palais de l’Elysée, au sortir d’un conseil des ministres, alors qu’il est ministre du budget et elle ministre de la santé. Copyright Patrice Picot/Gamma-Rapho/Getty images

Il s’agit d’un ouvrage qui prouve, sur la base d’archives incontestables, souvent inédites, que l’épuration salvatrice d’après guerre, construite et diffusée à grands moyens de propagande fut davantage un mythe qu’une réalité historique.

Grâce aux travaux d’Annie Lacroix-Riz, on apprend qu’en réalité, cette épuration, concentrée sur des cas particuliers massivement rendus publics, a surtout couvert la vraie réalité politique, celle de la non-épuration des élites.
Sous l’égide des ministères de l’Intérieur et de la Justice, les patriciens des milieux financiers, de la magistrature, de la police, de l’armée, du haut clergé, des organes de presse, de l’appareil politique, bref, de ce qu’on appelle « Le Système », furent non seulement épargnés, mais réintroduits dans toutes les instance de pouvoirs.

Le choix de la défaite

Couverture de l’édition poche. 1224 pages ; 13,90 € Le ministre allemand des Affaires étrangères, Joachim von Ribbentrop, et d’autres responsables nazis font le salut nazi sur la tombe du Soldat inconnu à Paris, en France, en décembre 1938. Le ministre français des Affaires étrangères, Georges Bonnet, fait le salut traditionnel derrière Ribbentrop. Ribbentrop était à Paris pour signer un pacte de non-guerre entre la France et l’Allemagne. | (Photo par Hulton-Deutsch/Hulton-Deutsch Collection/Corbis via Getty Images)

Quelles sont les causes de la Défaite de 1940 ? Le grand historien Marc Bloch écrivait en avril 1944 : « Le jour viendra […] et peut-être bientôt où il sera possible de faire la lumière sur les intrigues menées chez nous de 1933 à 1939 en faveur de l’Axe Rome-Berlin pour lui livrer la domination de l’Europe en détruisant de nos propres mains tout l’édifice de nos alliances et de nos amitiés. »

Cet ouvrage d’Annie Lacroix-Riz est incontestablement un ouvrage clé. Un de ces ouvrages fondateurs pour l’édification des consciences, actuelles comme futures. On pourrait dire de cet ouvrage qu’Une bibliothèque pleurerait à jamais son absence (Cf. La bibliothèque, la nuit de Alberto Manguel).

Car, comme l’a si bien dit Mark Twain, grand écrivain américain si mal compris dans son pays d’origine, les « EtaZunis » : « L’histoire ne se répète pas, c’est vrai, mais parfois, il faut bien admettre qu’elle rime« .

Et Annie Lacroix-Riz prouve que l’Histoire contemporaine, innervée par les immuables rapports de forces capitalistiques ne peut produire que des situations semblables.

Le choix de la défaite analyse l’histoire des années 1930 pour éclairer les causes de la défaite de 1940. Selon elle, les Français n’ont pas été simplement vaincus en cinq jours par une Wehrmacht invincible ; le haut patronat les a sacrifiés à son plan de « réforme de l’État » copié sur les voisins fascistes et à son obsession d’accord avec le Reich.

Grâce à cet ouvrage, on apprend que déjà, à cette époque, l’autonomie des politiciens ou des journalistes relevait du mythe. Que dire d’aujourd’hui ! Car c’est bien la France des grands intérêts économiques et financiers qui dicta le choix de l’Allemagne comme partenaire privilégié dès les années 1920 et sabota l’alliance russe de revers qui avait évité la défaite en 1914.

Industriels et banquiers français sous l’occupation

Membres des chambres de commerce française et allemande à la foire de Paris en septembre 1941. © LAPI/Roger Viollet

Dans cet ouvrage, Annie Lacroix-Riz examine la collaboration entre les dirigeants de l’économie française et les occupants allemands entre 1940 et 1944 et installe au grand jour le fin mot de cette collaboration : hors de tout principe éthique, patriotique, citoyen, il s’agissait en priorité absolue de maintenir, voire de continuer à accroître, les profits capitalistes dans une Europe unifiée, même sous domination allemande.

Début septembre 1941, certains des industriels et banquiers les plus influents de la France occupée par l’Allemagne expriment leur position sur les plans du Reich nazi pour la réorganisation du continent européen. Lors d’une réunion avec un haut fonctionnaire allemand de l’économie à Paris, après quelques mots d’introduction de Pierre Pucheu, un homme d’affaires qui venait d’être nommé ministre de l’Intérieur du régime de Vichy, Henri Ardant prit la parole. Le chef de la puissante Société Générale déclara qu’ils soutenaient fermement les idées de l’Allemagne pour l’Europe, notamment celles, sous la direction de Berlin, de supprimer les « frontières douanières et créer une monnaie unique pour l’Europe.
Cette déclaration était remarquable, d’autant plus qu’Ardant était alors considéré comme « le premier et le plus important des banquiers français.

Ainsi va se dérouler le récit historique de l’historienne Annie Lacroix-Riz, prouvant, on ne peut peut plus clairement, l’intime compromission des hauts milieux affairistes français, industriels et financiers, avec leurs homologues allemands, qu’ils soient nazis, n’importait aucunement.

Pour comprendre la collaboration volontaire d’une grande partie des industriels et banquiers français avec les forces d’occupation allemandes entre 1940 et 1944, il est nécessaire de connaître leur histoire. Cette collaboration remonte aux années 1920 et 1930.

Comme l’explique en détail Annie Lacroix-Riz, « c‘était l’époque où les groupes français intensifiaient leurs accords et leur coopération avec les groupes allemands, acceptant souvent une direction allemande claire, parfois même abandonnant des marchés, comme Schneider-Creuzot lorsque, en 1938/39, Skoda, un joyau de l’empire industriel en Tchécoslovaquie, passa aux mains des Reichswerke Hermann Göring. À cela s’ajoutait le fait qu’une partie des industriels et des banquiers français, inspirés par leur opposition à la gauche dans leur propre pays, se tournaient vers l’Italie dès les années 1920, puis vers le Reich allemand à partir de 1933, à la recherche d’alternatives politiques.

L’historiographie sur l’attitude de la France face à l’occupation allemande affirme que le régime de Vichy a facilité l’acceptation du Reich mais que le monde économique, s’y est soumis à contrecœur. Comme le démontre de manière convaincante Annie Lacroix-Riz, cela est faux. Faisant référence aux voix influentes parmi les industriels et les banquiers français qui, avant 1940 déjà, réclamaient une collaboration étroite avec le Reich, elle constate laconiquement : « On ne résiste pas à l’occupant qu’on a appelé et installé. »

Pour aller plus loin dans cette histoire européenne contemporaine, il faut lire son dernier ouvrage « Les origines du plan Marshall » qui permet de comprendre comment les Etats-Unis ont imposé leur hégémonie à l’aide du plan Marshall – en s’appuyant avant tout sur l’Allemagne.

« Il est incontestable qu’il y a en France (et ailleurs) une résurgence du fascisme…», disait Henri Guillemin dans une conférence diffusée en 1987. Il étudiait le climat politique et social en France depuis 1875 qui créera le terrain favorable à l’introduction et à la montée du fascisme jusqu’à sa forme gouvernementale (l’Etat français de Pétain) et aux tentatives putschistes de la guerre d’Algérie.

Catégories
Uncategorized

14 juillet 2022, et nos projets à la rentrée


1ère République – Estampe sur bois – 48,5 x 40,5 cm – Affiche créée en 1793. Bibliothèque nationale de France.
© Gallica, BnF

Davantage que des projets, il s’agit plutôt de réalisations prêtes à être mises en oeuvre dès le mois de septembre prochain et dont, effectivement, les travaux préparatoires remontent, pour certaines, à plusieurs mois.

Sous cet angle, nous avons le plaisir de vous présenter les trois sujets suivants :

Colloques

Le « s » a son importance car nous préparons deux colloques. L’un, d’une demi-journée, dès cet automne (novembre) ; l’autre, au format habituel, l’année qui suit, en 2023 (novembre).

1/ Colloque sur Emile Zola

Cette année marque les 120 ans de la mort d’Emile Zola, décédé le 29 septembre 1902 dans des conditions troubles. Cet anniversaire nous a poussés à organiser un colloque, non pas dans le domaine de l’Histoire politique, mais dans le domaine littéraire, investigué tout autant par Henri Guillemin.

Même si l’on connaît l’importance de Zola pour Guillemin (citons par exemple ses vingt préfaces pour chacun des tomes du cycle des Rougon-Macquart – préfaces rassemblées dans l’ouvrage Présentation des Rougon-Macquart édité chez Utovie – pour en savoir plus, cliquez ici), ce colloque visera à mieux rendre compte de l’oeuvre d’Emile Zola et de sa place dans le courant littéraire du naturalisme.

Nous étudierons le rapport de Guillemin à Zola, comme lecteur et comme défenseur, afin de saisir les raisons profondes de cet engagement à la fois littéraire et politique.

Puis nous présenterons ce que recouvre le courant littéraire du naturalisme, ce mouvement qui s’attache à peindre la réalité au plus près en s’appuyant sur un travail minutieux de documentation, et dont Zola était décrit comme le maître.
Comment Guillemin se situait-il par rapport à cet accent particulier du réalisme en littérature ?

Enfin, on étudiera l’un des romans les plus connus de Zola : « Germinal », et on examinera le regard porté par Guillemin sur cet ouvrage.

Emile Zola en 1870 photographié par Nadar

Ce colloque n’a pas le même format que les autres. Il occupera une dense demi-journée (9h30 – 13h00) et réunira trois intervenants, experts incontestés du sujet.
Autre nouveauté, les interventions seront plus longues (45 mn), permettant d’élargir le propos.
Il se tiendra en novembre 2022 (date précise en attente).

La réservation des places sera ouverte dans les premiers jours de septembre, selon les mêmes modalités que précédemment. Une newsletter informera du lieu et de la date d’ouverture.

Le programme du colloque est prêt. Pour le lire, cliquez ici

2/ Colloque sur l’affaire Dreyfus

Nous retrouvons Emile Zola. Nous retrouvons aussi le format de nos colloques biennaux (une journée, entre 6 et 8 intervenants).

Alfred Dreyfus en 1894, photographie de Aron Gerschel.

Ce colloque s’attachera à présenter les récentes recherches sur ce scandale d’Etat, et plus d’un siècle plus tard, à interroger le fonctionnement de nos institutions, les manoeuvres du pouvoir et le rôle des relais d’opinion par temps de crise.
Il tentera également de répondre à la question « que signifie être dreyfusard aujourd’hui ? »

Le colloque se tiendra en novembre 2023.

Coffret DVD « Guillemin et l’affaire Pétain »

L’éditeur et producteur Les Mutins de Pangée récidive !

Suite à l’énorme succès du coffret Guillemin et la Commune (pour lire la présentation générale, l’extrait vidéo et la revue de presse, cliquez ici), les Mutins vont publier à la rentrée un coffret analogue sur Guillemin et l’affaire Pétain :
Ce coffret et sa maquette originale comprend 3 DVD remasterisés image/son, la reprise en haute qualité de toutes les conférences données par Guillemin, l’ouvrage de Guillemin La vérité sur l’affaire Pétain sous forme de livret, et de très importants bonus originaux.

Nous avons décidé de soutenir ce travail en rejoignant le partenariat, renouvelé à cette occasion, entre les éditions Utovie et les Mutins.

Notre partenariat consiste en un pré-achat d’un lot de 60 coffrets qui seront proposés, en premier lieu aux adhérents, puis aux abonnés aux newsletters, à un prix préférentiel défiant toute concurrence.

La sortie du coffret est prévue à l’automne.

Nous indiquerons les détails du prix et des modalités de commande à la rentrée.

Inédits à l’Institut Marc Sangnier

Patrick Rödel nous signale un faisceau d’événements concernant l’activité de l’Institut, plus précisément une exposition et la publication de deux ouvrages inédits relatifs à la Mission Paul Sangnier, second fils de Marc Sangnier, mort accidentellement à l’âge de 21 ans le 10 avril 1939.

La maison de l’Amérique latine à Paris, propose jusqu’au 24 septembre 2022 une exposition « Marronage, l’art de briser ses chaînes », consacrée à la créativité artistique des Noirs Marrons.
Un espace présente la Mission de Paul, le plus jeune fils de Marc Sangnier, qui le conduisit en Guyane en 1938, terre encore largement inexplorée, d’où il rapporta nombre d’objets, de photos et de films.

A cette occasion, deux ouvrages inédits sont publiés :

Ed. Argos – 108 pages – 15 €

En premier, « L’erre d’une vie » de Anicette Sangnier, petite-fille de Marc Sangnier (et nièce de Paul), paru aux éditions Argos.
A partir d’archives familiales, Anicette Sangnier livre, de façon sensible, les éléments du travail de son oncle et de sa fin tragique, survenue trop tôt.
(Pour en savoir davantage, cliquez ici)

En second, « Lettre à une mère » de Jules Caille, guide de Paul Sangnier lors de sa mission ethnologique en Guyane en 1938, également aux éditions Argos.
Notes, rédigées sous forme d’une lettre adressée à la mère du regretté explorateur, publiées ici dans leur intégralité.

Patrick Rödel réalisera une recension de « L’erre d’une vie » qui sera diffusée à la rentrée dans notre rubrique « Chemins de traverse ».

Henri Guillemin et la Révolution française

En 19 émissions, Henri Guillemin retrace l’histoire de la Révolution française.
L’historien a travaillé pendant 10 mois à la préparation de ces émissions, enregistrées d’une traite en 7 matinées.
Pour l’historien, la grande figure qui se détache de toute cette période révolutionnaire est celle de Robespierre, qui n’est pas du tout l’homme sanguinaire d’une certaine légende.
En somme, une réhabilitation de l’Incorruptible.
(source : site RTS)

Pour voir et écouter Henri Guillemin, pour plonger à nouveau dans l’explication des immenses enjeux de cette période emblématique, rendez vous sur le site de la RTS (Radio Television Suisse Romande) en cliquant ici

Bonnes lectures, bonnes vacances et bel été à tous !

Noté rédigée par Edouard Mangin

Le démantèlement (2019) – Tableau de Daniel Mangin (né en 1957) – huile sur toile 97 x 130 cm – collection particulière


Catégories
Uncategorized

Prix Henri Guillemin et autres activités

Avant de se quitter pour célébrer les traditionnelles Fêtes de fin d’année, voici, à travers la dernière lettre d’information de l’année 2019, les plus récentes nouvelles sur les actions qui ont été initiées et qui vont se poursuivre en 2020.

Et je commence par….

Prix Henri Guillemin

A dix jours de la clôture des propositions émises par vous tous, fixée au 31 décembre,  il est possible de penser qu’il n’y aura plus d’autres suggestions qui nous parviendront. La liste des titres proposés peut être arrêtée aujourd’hui. Bien entendu, tout ouvrage arrivant d’ici la fin de l’année sera pris en considération.

Après un démarrage timide,  nous avons reçu au total 14 titres d’ouvrages qui correspondent tous aux critères retenus pour le Prix, notamment le plus central, le « désenfumage » des esprits et la déconstruction de l’histoire officielle. Ils relèvent tous également du domaine de l’Histoire politique au sens large et, à part un titre, appartiennent à la période contemporaine.

C’est dans cette liste que nous allons maintenant sélectionner 6 titres.

Début février prochain, ces 6 ouvrages seront confiés a chacun des membres du jury pour lecture et critique, pendant une période confortable de 7 mois. En effet, début septembre 2020, le jury se réunira à Paris pour déterminer le lauréat du Prix Henri Guillemin.
A ce stade, la date et le lieu ne sont pas encore définis. Nous avons encore le temps. Pour ce sujet, une réunion physique s’impose naturellement. Si d’aventure un contexte défavorable devait compliquer les choses, nous trouverons alors la meilleure solution de repli.

Comme nous vous l’avions indiqué, voici la liste des propositions reçues de votre part :

La non-épuration en France de 1943 aux années 1950 de Annie LACROIX-RIZ – éd Armand Colin

Sorcières de Mona CHOLLET – éd. Zones

La France qui déclasse : Les gilets jaunes, une jacquerie au XXIe siècle de Pierre VERMEREN – éd. Tallandier

Les communistes et l’Algérie – des origines à la guerre d’indépendance, 1920 -1962 de Alain RUSCIO – ed. La Découverte

Une histoire politique du Tiers-Monde de Vijay PRASHAD – éd. Ecosociété

Le venin dans la plume de Gérard NOIRIEL – éd. La Découverte

Les lois du capital de Gérard MORDILLAT et Bertrand ROTHE- éd. Seuil

Maximilien Robespierre : L’homme derrière les légendes de Hervé LEUWERS – éd. PUF

Mémoires vives de Edward SNOWDEN – éd. Seuil

L’Histoire comme émancipation de Laurence DE COCK, Mathilde LARRERE et Guillaume MAZEAU – éd. Agone

Comment l’Amerique veut changer de Pape de Nicolas SENEZE – éd. Bayard

La guerre sociale en France – Aux sources économiques de la démocratie autoritaire de Romaric GODIN – éd. La Découverte

Récidive 1938 de Michaël FOESSEL – éd. PUF

Régression de la démocratie et déchaînement de la violence de Monique CHEMILLIER-GENDREAU – éd. Textuel

Le travail du jury commence donc bientôt. En février, vous saurez quels sont les six titres retenus.

Henri Guillemin et l’Afrique

Nous recevons régulièrement, de façon plus ou moins espacée, des messages d’internautes nous demandant des informations particulières sur Henri Guillemin, nous apprenant tel ou tel fait, nous encourageant à continuer ou simplement nous félicitant.

Parfois les messages sont plus cocasses ou surprennent par leur origine. C’est le cas ici.

Il y a quelques jours, nous avons reçu un message en provenance d’Afrique. Il fait sourire de sympathie et réchauffe l’enthousiasme. Et de plus, pile au moment des Fêtes, la période où il faut festoyer.
Je reproduis le message ci-dessous :

De : Pierre N DOH
Sujet : prise de contact
Corps du message :
Bonjour, je viens de decouvrir, Mr Guillemin et une partie de son travail
sur la chaine histoire. Franchement je suis tombé de haut ! Enfin la vraie
Histoire celle que l’on n’apprend pas à l’école, et qui permet de mieux
comprendre l’évolution de nos sociétés. Je suis d’origine africaine et vis au Gabon et Cameroun. MERCI et cordialement ….

Bien sûr, réponse de vifs remerciements fut adressée et même encouragement à nous suivre à travers le site et à s’abonner à nos « newsletters ».

Cet internaute découvre comme un nouveau monde. Beaucoup d’entre nous ont éprouvé cette joie après avoir découvert les travaux de Guillemin, ses conférences vidéo.

M. Doh a également eu la gentillesse de me donner la meilleure des transitions pour mon dernier sujet. Il découvre, grâce à Guillemin, que l’Histoire enseignée à l’école, est  bonne à… Oui, eh bien, cette question sera justement le thème débattu lors du prochain colloque.

Colloque Henri Guillemin

La date du prochain colloque est fixée au samedi 28 novembre 2020 à Paris. Le thème portera sur la perversion de l’enseignement de l’Histoire qui confine à une véritable propagande des classes dominantes.
Un titre a émergé au fur et à mesure de l’organisation de l’événement : « L’enseignement de l’Histoire en péril – Histoire politique, histoire littéraire, histoire de la pensée économique – une amnésie collective organisée ».
Ce titre n’est pas encore définitif mais l’idée est bien là.

Le colloque rassemblera des personnalités de prestige dont nous dévoilerons les noms très vite, en début d’année prochaine. Il réunira pas moins de 8 intervenants de haut niveau, dont le témoignage dans les différents domaines concernés, visera à montrer clairement un état des lieux alarmant et bien réél, même s’il est passé sous silence.

Cette journée se présente comme un moment particulier d’une riche intensité et devrait, je pense, apporter de quoi renforcer l’esprit critique.

La première difficulté à résoudre dès janvier prochain sera de trouver une salle. Dénicher une salle aujourd’hui à Paris pour ce type de manifestation est un travail en soi, tellement les conditions sont devenues difficiles.
Mais nous y arriverons.

Edouard Mangin
(Qui vous souhaite, au nom de l’association, de trés bonnes Fêtes de Noël et de fin d’Année).

Affiche du film documentaire africain (Soudan) « Talking about trees » de Suhaib Gasmelbari (né en 1979). Récit de quatre amis passionnés de cinéma qui décident de réhabiliter une ancienne salle de cinéma à Khartoum, dénommée « La Révolution », pour projeter des films à une population qui n’a pas accès au cinéma indépendant. [et pourquoi pas y tenir aussi des colloques Guillemin – N-d-l’E]

Catégories
Uncategorized

Quand Guillemin lisait Sartre

Jean-Paul-Sartre 1946 Life Magazine

 Jean-Paul Sartre en 1946 (photo tirée de Life Magazine)

Les chroniques du Caire n° 3

Simenon, dont nous avons parlé dans le n° 1 de cette série sur les articles d’Henri Guillemin pour La Bourse égyptienne du Caire, était son contemporain exact : Guillemin est né le 19 mars 1903, Simenon le 13 février. Jean-Paul Sartre, né le 21 juin 1905, est de plus de deux ans son cadet, mais ils se sont connus de près pendant les années qu’ils ont passées ensemble à l’E.N.S. de la rue d’Ulm, où Sartre a été reçu en 1924 et Guillemin un an plus tôt. Dans une page rédigée en décembre 1960, Guillemin évoque « Nizan et Sartre » et le duo aussi anticonformiste qu’inséparable qu’ils formaient ; et il précise, au sujet de Sartre : « Il était très cordial avec moi, très copain » (Parcours [1988], Utovie, 2015, p. 23).
Après leur sortie de la rue d’Ulm, les deux camarades se retrouvent enseignants dans le secondaire dans des villes différentes, l’un en lettres, l’autre en philo ; ils se perdent de vue, et ne semblent pas s’être à nouveau rencontrés, mais Henri Guillemin a continué de suivre l’itinéraire de Sartre, qui le passionne : huit articles entre 1938 et 1991.

Les deux dont il s’agit ici sont les deux premiers : 13 février 1938, sur La Nausée, et la partie de la chronique du 28 mai 1939 consacrée au recueil de nouvelles Le Mur, qui porte comme titre celui de son premier texte, antérieur à La Nausée comme on le voit dans l’ouverture de l’article de 1938 :
« J.-P. Sartre n’avait, encore, publié aucun livre ; mais nous le connaissions tout de même ; dans la Nouvelle Revue française de juillet 1937, il avait fait paraître un récit : Le Mur ; et tous ceux qui avaient lu ce texte savaient que le nom de J.-P. Sartre valait qu’on le retînt. Vingt pages, et la preuve était faite : celui-là, cet inconnu, c’était un écrivain. »

La Nausée

La Nausée, petit livre discret, dont « le titre, même, risque de le compromettre aux yeux des lecteurs délicats, […] n’est pas ce que les libraires appellent un ouvrage très “public”. La manière de J.-P. Sartre n’est pas celle de P. Benoît » [Pierre Benoît, romancier alors fameux]. Sartre ne cherche-t-il pas, même, à choquer ? « il ne paraît pas respecter beaucoup les hiérarchies sociales ; on dirait même qu’il n’y croit pas. Pour comble, tout se passe comme s’il s’exposait exprès, insolemment, à se faire traiter de malade, de détraqué, peut-être même de surréaliste ».
Jusque-là, me direz-vous, pas vraiment présent, le « ton » dont nous cherchons la trace en lisant ces chroniques. Mais le voici, ce ton, les voici, les thèmes familiers, lorsque Guillemin, à la fois honnêtement et avec une habileté assez jésuitique, dit et ne dit pas ce qui l’impressionne, oui, mais aussi le gêne dans La Nausée :

couverture livre 1964
« Quel drôle de bouquin ! Je viens d’en achever la lecture et je ne sais pas bien encore ce que j’en pense. Une voix me souffle : “Avoue que, de temps en temps, ça t’a assommé”. Pas vrai ! Déconcerté, oui, un peu ahuri ; je ne suivais plus, je n’y étais plus très bien. Je devinais qu’il y avait quelque chose à comprendre, quelque chose d’intéressant, d’important, et que Sartre peinait pour me le faire sentir ; mais je ne l’entrevoyais que vaguement, c’était de ma faute, non de la sienne ; et ce qu’il avait à traduire – la nausée justement, cette “nausée métaphysique” qui fait tout le sujet de son livre –, ce n’est pas tellement commode d’en suggérer l’idée, d’en faire passer en nous, ne serait-ce qu’en éclair, la sensation. »

Couverture du livre en édition poche – 1964 (domaine public)

Que veut Sartre ? certes « point nous divertir », mais « nous transmettre, nous livrer […] sa vue du monde, sa conception de l’univers ; ce que chacun de nous a de plus important à dire, c’est toujours cela, ce n’est jamais que cela » : conviction forte de Guillemin, en effet, nous le savons. Le problème, c’est qu’Antoine Roquentin, le héros de Sartre, est un « fort en philosophie » ; « le gaillard est métaphysicien en diable, et son journal – car La Nausée se présente sous forme de mémoires, de papiers intimes – son journal a l’air, par moments, […] d’un manuel illustré. Le professeur Sartre, dans sa classe, ne doit pas avoir son pareil pour intéresser ses élèves aux problèmes les plus abstraits ; ce don qu’il a d’éprouver pathétiquement ce qui, chez tant d’autres penseurs, demeure dans la calme région inoffensive et glacée des concepts, il s’en est servi pour bâtir un livre. Seulement, à coup sûr, c’est un livre austère […] peut-être pas, pour nous, futiles, aussi exaltant que L’Atlantide ». Le roman d’aventures de Pierre Benoît, nommé déjà au début de l’article, remonte à 1919 ; peut-être Guillemin y pense-t-il comme à une lecture de son adolescence?

Dürer_Melancholia

Mélancolie de Albrecht Dürer – 1514. Titre souhaité initialement par JP Sartre pour son livre (domaine public)

En tout cas on ne peut pas dire qu’on retrouve ici son adhésion intuitive si forte à l’univers de Simenon. Trop “intello”, alors, l’ancien camarade Sartre ? difficile à dire. Quand Guillemin écrit : « Il y a, par bonheur, dans La Nausée, des thèmes beaucoup plus accessibles », dit-il « par bonheur » au premier degré, ou ironise-t-il sur le soulagement de ces lecteurs qu’il appelait plus haut « futiles », en s’incluant dans leur nombre ? Ces thèmes plus faciles, c’est, par exemple, la caricature de la bourgeoisie du Havre, ville où Sartre a fait ses débuts d’enseignant de lycée et qu’il représente sous le nom de Bouville. Guillemin a savouré comme un des « morceaux de bravoure parfaitement réussis » du livre, l’évocation des notables « à la sortie de la messe “chic” » ; il a aimé aussi « deux scènes où reparaît la “patte” puissante, la griffe du lion que Le Mur nous a révélée : Antoine en présence d’Anny, sa maîtresse, et la cruelle histoire de l’Autodidacte, à la fin ». On a l’impression que, petit à petit, à mesure qu’il relit mentalement l’œuvre pour rédiger sa chronique, Guillemin cède, et met finalement chapeau bas devant ce qui est moins un roman qu’un « témoignage » et un « document » :

« Cette violence même, cette violence surtout, ce ton de haine, ces crachats de mépris (“Je ne veux pas de communion d’âme ; je ne suis pas tombé si bas !”), toute cette frénésie et ce désespoir, toutes ces preuves, en somme, qu’il y a bien là un homme, et pas un auteur, […] tout cela, oui, est assez bouleversant».

Guillemin conclut son analyse d’une façon qui commence à nous être familière, en se penchant sur l’aspect métaphysique du livre. La religion, aux yeux de Roquentin, n’est qu’ « un prétentieux néant », et pourtant « ce dépossédé », dit Guillemin à la lecture de la fin du roman, « au fond de l’abîme, découvre une issue ; quelque chose qui le justifierait peut-être un petit peu d’exister : créer, avec sa douleur même, une chose belle, un beau livre, simplement pour “souffrir en mesure”. Je ne sais pas si J.-P. Sartre a songé à Flaubert ; mais cela, c’est exactement, c’est littéralement du Flaubert ; c’était sa recette à lui, l’homme de Croisset, pour échapper à la “nausée”, surmonter le destin, atteindre quand même à un absolu ».

En 1938 le rapprochement entre Sartre et Flaubert vient à l’esprit de Guillemin parce qu’il travaille alors à son livre Flaubert devant la vie et devant Dieu, qui va paraître l’année suivante, préfacé par Mauriac ; mais ce rapprochement est pertinent aussi à longue échéance, et même intuitivement visionnaire, puisqu’on sait que, plus de trente ans plus tard, Sartre a consacré des milliers d’heures à essayer de comprendre qui était L’Idiot de la famille (titre de son énorme ouvrage inachevé sur la vie de Flaubert, 1971-1972).

Le Mur

Les questions que nous nous posions sur l’attirance (ou non) de Guillemin pour Sartre romancier, et sur ses réserves à son égard, restent intactes et même se renforcent à la lecture de la critique pour le moins mitigée du recueil Le Mur, parue quinze mois après l’article sur La Nausée.

Couverture le mur

Guillemin rappelle pour commencer le souvenir du Mur (la nouvelle), ce texte « extraordinairement habile », « une manière de révélation », puis il revient brièvement sur La Nausée, dont il donne une définition plutôt meilleure que dans le premier article : « une tentative pour rendre sensible aux lecteurs les moins “philosophes” […] une façon d’envisager le monde, ce désarroi de la pensée devant le fait qu’un univers concret nous entoure, que nous subissons les objets, leur présence, leur densité, et qu’il y a là, pour l’intelligence, une sorte de scandale, de heurt perpétuel contre un inconnaissable gratuit, écrasant, absurde ». Puis il en vient assez vite à ce qu’il croit devoir dire, que les « cinq récits » du nouveau volume, Le Mur, La Chambre, Érostrate, Intimité et L’Enfance d’un chef, « suivent une courbe descendante », autrement dit : sont de moins en moins bons. Juste un mot sur Le Mur, relu avec « la même émotion, la même admiration bouleversée que jadis » ; à propos du deuxième récit, dont le héros est un dément, Guillemin évoque la rue d’Ulm :

Couverture du livre en édition poche – 1961 (domaine public)

« La Chambre me rappelle le temps où Sartre, normalien, allait chaque semaine, sous la direction du professeur Dumas, visiter les fous, les observer, les étudier dans je ne sais plus quel hôpital parisien. Il nous rapportait de ces expéditions des détails tragiques ou cocasses. La Chambre est une histoire de fou ; un fou que sa femme protège, garde farouchement, dans cette chambre obscure, irrespirable, d’où il ne sort plus et qui est devenue leur univers à tous deux. Ces pages-là sont belles, d’une beauté horrible sans doute, vaguement effrayante ; mais c’est une réussite parfaite […] ». Suit une analyse détaillée, suivie de ce bilan : « Étouffant, maléfique si l’on veut, admirable tout de même ce récit de La Chambre. La suite, hélas, ne nous procurera plus rien qui soit de cette force ».

Ce sont surtout les deux dernières nouvelles (Intimité et L’Enfance d’un chef) qui déçoivent le lecteur du Mur, même s’il est conscient du fait que c’est en toute lucidité que Sartre y a peint « des créatures à-vau-l’eau, inconsistantes, qui font à la surface de ce monde leur petit bruit dérisoire ; des papillons du néant ». Oublions ces échecs : « Sartre a donné la preuve qu’il ne faut pas le juger sur des essais médiocres, que nous lui ferions tort en prenant pour des témoignages authentiques de lui-même ces divertissements inutiles ». Guillemin dit très bien à quel point il ne sait où se situer, lui lecteur de Sartre : « […] je ne voudrais ni desservir Sartre (à cause du Mur) ni le servir », alors je fais « seulement de la critique littéraire [sic] ; et sur ce plan-là je me borne à noter qu’autant Le Mur est une belle chose, autant sont faibles, et pauvres, et même un peu fatigantes, les deux nouvelles de la fin ».

Guillemin faire « seulement de la critique littéraire » ? voire ! C’est surtout qu’il a été dérouté, puis déçu, par ce qu’écrivait son ancien camarade ; il admire, et en même temps impossible de taire sa réticence, malgré tel « petit groupe de pages lucides, qu’il faut signaler » (dans L’Enfance d’un chef). Alors pour s’en sortir, Guillemin finit comme j’ai commencé, en évoquant le passé sous la forme d’une boutade :

JP Sartre et P Nizan en 1924Jean-Paul Sartre (gauche) et Paul Nizan (droite) à Paris en 1924

« “Sartre et Nizan” : nous prononcions toujours ces deux noms ensemble, quand nous étions à l’École normale. Deux copains qui ne se quittaient guère. Tous deux se sont maintenant affirmés dans la jeune littérature. Nous sommes un petit nombre – ceux des “promos” 1923-1924 – qui clignons de l’œil lorsque, dans La Nausée, au coin d’une page, apparaît un gendarme du nom de Nizan. De La Nausée à L’Enfance d’un chef, le gendarme a reçu de l’avancement, nous l’apercevons brusquement à la table de famille des Fleurier ; il est devenu général. » Et c’est la fin de l’article…

Dans une langue plus moderne, cela s’appelle « botter en touche ». Par la suite, Guillemin ne reparlera plus jamais de l’œuvre de fiction de Sartre, de ses autres romans, de son théâtre ; il ne s’intéressera qu’à son itinéraire éthique, et la seule mention de lui dans le livre que nous avons fait ensemble vient à propos du livre de Jeanson sur sa Pensée morale (voir Le Cas Guillemin, éd. originale, Gallimard, 1979, p. 148 ; une version revue de cet ouvrage est en préparation chez Utovie).

Au fond Sartre a passionné Henri Guillemin comme penseur de la destinée de l’homme, mais ne l’a que bien partiellement convaincu comme écrivain… Et nous ? que penserons-nous si nous (re)lisons La Nausée ?

Recension réalisée par Patrick Berthier

racine marronnier

« L’arbre des voyelles » de l’artiste Guiseppe Penone – métaphore de l’Absurdité, clé de la Nausée pour Roquentin (domaine public)

Les chroniques du Caire

Les critiques littéraires qu’Henri Guillemin écrivit pour le quotidien La Bourse égyptienne pendant près de deux ans sont actuellement en cours de préparation par Patrick Berthier pour une publication exclusive chez Utovie prévue prochainement. Nous remercions les éditions Utovie d’avoir accepté que l’on publie, en avant-première sur le site, le texte intégral de ces chroniques sur Sartre.

D’autres chroniques sur Céline, Mauriac, Bernanos, etc… suivront très prochainement. 

Pour lire l’intégralité de la chronique écrite par Henri Guillemin dans la Bourse égyptienne, cliquez ici

Pour imprimer la recension de Patrick Berthier, cliquez ici