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Vient de paraître ! Un nouvel ouvrage d’Henri Guillemin

Couverture de l’ouvrage – Édition établie par Patrick Berthier – Préface de Guy Peeters – Editions Utovie – 364 pages – 32 €

La présentation de l’éditeur

Sont réunis ici des articles publiés par Henri Guillemin entre 1964 et 1974 et édités en 1975 par le Cercle d’Éducation populaire de Bruxelles (C.E.P.), au public duquel il a proposé à cette époque de nombreuses conférences. Il ne s’agit pas de transcriptions de ces conférences, mais d’articles, presque tous parus dans La Tribune de Genève ; cela dit, les thèmes sont, ici et là, ceux qui passionnaient l’orateur comme le journaliste.

Les articles ne sont pas repris dans l’ordre de leur publication, mais suivent un plan thématique par grands sujets : l’évolution du christianisme, la place des écrivains dans leur siècle, la façon dont s’écrit (ou devrait s’écrire !) l’Histoire. Ce plan reste souple, car parler de Lamartine amène à interroger son attitude religieuse, sa poésie, son courage politique ; même chose pour Victor Hugo. De ce fait les articles de la fin du volume, plus explicitement historiques (sur la Révolution, sur la guerre de 70 et les deux suivantes…), se placent en réalité dans la continuité de ceux qui paraissaient n’être “que” littéraires. Tout s’interpénètre.

Autant dire que ce livre est un captivant raccourci de l’œuvre écrite et parlée de Guillemin. Le volume du C.E.P. avait été publié “nu”, sans même les dates des articles. Pour la réédition on a indiqué non seulement ces dates, mais les remaniements (surtout des coupures) subis par une partie des textes. Par ailleurs des notes clarifient les allusions à ce qui, cinquante et soixante ans après le temps de l’écriture, ne parle plus ou plus assez au lecteur actuel. Tout a été fait pour que, dans cette anthologie, Guillemin s’adresse à nous comme il s’adressait à ses contemporains, en leur disant « vous » et en les entraînant à sa suite.

Pour compléter, ces extraits. Lumineux Guillemin !

L’ouvrage rassemble soixante-huit articles dont le plaisir de lecture est semblable à celui éprouvé pour Chroniques du Caire (pour en savoir plus, cliquer ici ) : d’abord la verve de Guillemin, la pertinence de son propos un demi-siècle plus tard, et enfin l’intérêt notable du complément de notes et référence rédigées par Patrick Berthier ; l’ensemble formant autant de niveaux de lecture différents et complémentaires.

Au point qu’on pourrait penser que ces deux ouvrages forment un diptyque sous coffret consacré à Guillemin chroniqueur. Et pourquoi pas imaginer une future trilogie si un troisième volume devait voir le jour, tellement les archives sont riches !

Les articles proprement historiques et politiques se trouvent à la fin du volume. Ils sont tous captivants.
Lire par exemple Le régime de Vichy a-t-il été un moindre mal à propos du livre de l’américain Robert Paxton La France de Vichy, ou bien Ces hommes qui font l’Histoire, avec les portraits de Marx, Lénine, de Gaulle … est proprement jubilatoire.

Mais celui dont le titre interpelle aussitôt, et particulièrement aujourd’hui, Le sens des mots. Que veut dire « démocratie », force l’attention quant à la justesse de l’analyse historique et politique.

D’une plume alerte, toujours dirigée contre les versions officielles et mensongères de l’Histoire – sa marque de fabrique – Henri Guillemin remet les pendules à l’heure. C’est le texte d’un amoureux de l’Histoire et de la vérité.

Ecrit il y a cinquante ans, cet article offre aux lecteurs d’aujourd’hui les connaissances objectives pour comprendre par eux-mêmes, et sur la base de la réalité de faits historiques, les importants enjeux en cours actuellement sur la scène internationale.
Un exemple d’honnêteté intellectuelle, qualité malheureusement disparue aujourd’hui des médias de masse.

En exclusivité, le voici retranscrit ici in extenso avec l’aimable autorisation de l’éditeur.

Couverture de l’ouvrage – Editions Robert Laffont (janvier 1973) – 415 pages – disponible à prix modiques sur le marché de l’occasion)

Le sens des mots. Que veut dire « démocratie »

On ne connaît pas encore assez les travaux de François Fonvieille-Alquier. C’est en 1971 qu’il a publié son remarquable ouvrage : Les Français dans la drôle de guerre, puis coup sur coup, en 1973, nous avons eu de lui un bref et très curieux essai : La Fin des dogmatismes et ce livre et considérable : La Grande peur de l’après-guerre (1946-1973), un volume de plus de quatre cents pages qui regorge de documents en même temps que d’observations pertinentes. C’est sur cet ouvrage-là que je voudrais appeler ici l’attention ; une attention qu’il mérite, me semble-t-il, au plus haut point.

Le thème central de son étude est le suivant : on croit encore communément que l’Occident fut bien forcé de s’unir et de préparer sa défense, au lendemain de la dernière guerre, contre une URSS menaçante et qui, si elle n’en avait été dissuadée, par les moyens requis, n’eût pas manqué d’établir sa domination sur l’Europe entière. Un calme examen des faits établit cependant que, du côté de Moscou, bien des comportements interprétés comme offensifs étaient, au vrai, des « réactions de peur ». Les Russes ne pouvaient guère oublier, en effet, ce qui leur était arrivé dès après leur révolution de 1917 et l’assaut général qu’ils avaient alors subi, avec la participation des Français et des Anglais appuyant les rebelles « blancs » (les Koltchak, les Denikine et les Wrangel) qui tentaient d’écraser le nouveau pouvoir ou, du moins, de démembrer le pays. Ils gardaient un brûlant souvenir de l’agression dirigée contre eux par les Polonais.

Rappelons les choses telles qu’elles furent : les frontières orientales de la Pologne ressuscitée suivaient la « ligne Curzon » qui respectait avec soin les ethnies. Croyant pouvoir profiter de la faiblesse militaire russe, le gouvernement polonais attaque et fonce : il veut étendre à l’Est, au mépris du « droit des peuples », son territoire. Après un premier insuccès, il gagne la partie, aidé par la France de Millerand qui lui a envoyé Weygand à la tête d’une importante « mission » et la Pologne victorieuse impose à la Russie le traité – le Diktat – de Riga, 19 mars1921, qui lui arrache ce qu’on pourrait appeler sans inexactitude une énorme « Alsace-Lorraine » : la Biélorussie et une partie de l’Ukraine, annexant ainsi de force plus de trois millions de Russes désormais baptisés « Polonais ». La réparation de cette iniquité n’aura pas été étrangère à la signature, en août 1939, du pacte germano-russe qui permettait à l’URSS de récupérer, sans entrer elle-même en guerre, les territoires et les populations dont elle avait été, scandaleusement et par la violence, dépouillée dix-huit plus tôt.

Juillet 1941, Hitler vient de se jeter sur l’URSS, et les Etats-Unis n’entreront dans le conflit qu’en décembre, à la suite de Pearl Harbor. Le futur président des Etats-Unis, Truman, en juillet 1941, accorde une interview au New York Times. Et que dit-il ? Il est cynique à ravir, déclarant tout net : « si nous voyons que l’Allemagne est en train de gagner la guerre, nous devons aider la Russie. Mais si nous voyons, au contraire, que la Russie est en passe de triompher, c’est l’Allemagne que nous devons aider. Pour l’heure, il s’agit de laisser l’une et l’autre s’entre tuer le plus possible ».

Ce texte public, l’URSS peut en méditer tout le sens. Roosevelt n’est pas Truman et, sans arrière-pensée, je le crois, il a engagé son pays contre le nazisme aux côtés de la Grande-Bretagne et de l’URSS, et Churchill a été d’accord avec lui, aussi bien à Téhéran (1943), qu’à Yalta (1945), pour reconnaître à l’URSS, un glacis tant à l’ouest (Pologne et Prusse) qu’au sud-ouest (les Balkans moins la Grèce). Churchill lui-même comprend que Staline ait peu d’amitié à l’égard du « gouvernement polonais » en exil, réfugié à Londres depuis 1939, et dont chacun sait – Churchill le premier – qu’il est encore plus anti russe qu’anti allemand, âprement résolu à conserver les biens mal acquis de 1921. Là est l’explication de la lugubre affaire du soulèvement de Varsovie, que Staline laissera sans secours, permettant à l’occupant nazi une répression atroce.

François Fonvieille-Alquier invite ses lecteurs à se pencher sur une question de vocabulaire. L’Occident s’affirme « démocratique », et l’Est se targue de ne l’être pas moins. Démocratie libérale, dit l’une ; démocratie populaire, répond l’autre. Et le fait est que la liberté individuelle demeure, en principe, assez large en Occident (d’où les « brillantes variations » comme dit Fonvieille-Alquier, de Raymond Aron sur la « liberté de l’esprit »), alors qu’elle connaît, à l’Est, les restrictions les plus dures, rien n’étant moins contestable que la rigueur du régime policier dans les démocraties populaires.

Mais le dictionnaire soviétique n’est pas celui des Occidentaux. Pour Lénine, comme pour Marx, comme pour Blanqui, la démocratie à l’occidentale n’est qu’un leurre. Et il est certain qu’on a pu s’en apercevoir en France par exemple où, grâce à M. Thiers et ses fidèles successeurs, le suffrage universel, adroitement manié, donnait aux électeurs l’illusion de choisir eux-mêmes leur destin, tandis qu’en vérité le « petit nombre » – l’affairisme – continuait à gérer à son profit les richesses, accaparées, de la nation.

Si la démocratie se définit par l’adhésion majoritaire à telle forme de gouvernement, on ne saurait nier que l’hitlérisme, porté au pouvoir en Allemagne par une formidable majorité d’électeurs, constituerait, dans cette optique, la plus parfaite des « démocraties ». Pour Marx et Lénine, la démocratie n’a d’existence réelle qu’au moment où les oligarchies financières sont détruites et quand les ressources du sol et du sous-sol, ainsi que les grands moyens de production, sont restitués à la collectivité.

La Grande peur de l’après-guerre nous fait prendre conscience, d’une manière saisissante, de ce qu’eut d’extraordinaire l’entreprise dont l’usuelle léthargie des foules ne parut pas autrement secouée ; je veux parler du prodigieux renversement d’alliance qui s’opéra avec une telle rapidité, sous la poussée américaine – la poussée Truman – muant cette Allemagne, haïe la veille pour avoir mis le feu à l’Europe, en un allié courtisé, choyé, privilégié.

Le réarmement allemand – dont l’URSS pouvait à juste titre s’inquiéter – devint l’ambition majeure des Anglo-Saxons, et c’est particulièrement et très littéralement dans ce dessein que nous entendîmes à Zurich, le 19 septembre 1946, Churchill évoquer, réclamer « les Etats-Unis d’Europe », organisation dont, pour lui, la principale composante devait être une Allemagne puissamment remilitarisée. Le discours de Zurich ne peut s’interpréter dans son intention précise que par référence au discours prononcé quelques mois plus tôt par le vieux « lion » anglais, à Fulton, en présence de Truman, véhément appel à un anti soviétisme militant.

Et c’était à l’heure même, je m’en souviens, où l’un des plus ardents apôtres du « Réarmement moral » m’expliquait sans ambages que ce noble et généreux effort comportait en corollaire obligatoire, un réarmement de l’Allemagne non plus « moral » seulement, mais matériel avec ampleur.

A lire, à lire, le gros et lucide travail de François Fonvieille-Alquier, lequel n’est pas communiste, et qu’un seul souci anime, celui de voir clair et de ne pas s’en laisser conter.

Henri Guillemin

A lire, à lire… Oui et même à relire, pour savourer l’ironie, le sens des mots, la lucidité politique, et bien sûr la portée historique.

« …. qu’un seul souci anime, celui de voir clair et de ne pas s’en laisser conter. »

Cette dernière phrase de l’article renvoie immédiatement à un autre article savoureux de l’ouvrage (mais ils le sont tous !), dans lequel Guillemin explique comment il a découvert les trucages et mensonges en Histoire littéraire et politique.

Un court extrait :

« … Et c’est ainsi qu’entraîné par Lamartine du côté des événements de 1848, par Hugo du côté du 2 décembre, par Zola du côté de l’affaire Dreyfus, j’en suis venu à me passionner pour l’Histoire tout court, ouvrant les yeux avec stupeur sur les arrangements concertés, et sans rapport avec le réel, dont mon esprit, jadis, avait été pourvu et que je voyais – que je vois toujours – s’épandre avec ampleur dans ces multiples périodiques, consacrés, paraît-il, à l’Histoire et dont l’intention évidente est de maintenir le grand public dans une vue du Passé décente, correcte et bénigne, qui fera des lecteurs autant d’électeurs rassurants… ».

Cet extrait provient du quatrième article, intitulé avec bonheur Le refus de se laisser monter sur la cervelle. (Article utilisé par Patrick Berthier pour son intervention au colloque « Enseignement de l’Histoire en péril » – 6 novembre 2021. Pour en savoir plus, cliquer ici).

Ces quelques mots résument à eux seuls l’engagement d’Henri Guillemin, une posture militante toujours d’actualité.

Henri Guillemin

Note rédigée par Edouard Mangin

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Henri Guillemin et Benjamin Constant

 

Catherine Seylaz-Dubuis – photographie de Sophie Godel

Introduction

En juillet 2021, Catherine Seylaz (nom de plume Dubuis), nous proposa un texte relatant un souvenir d’enfance à propos d’une conférence de Guillemin sur Paul Claudel, donnée à Lausanne en 1955.
Texte qui donna lieu à une newsletter diffusée le 14 juillet et dont voici un court extrait :
« …Enfin, voici le souvenir d’un homme allant et venant sur la scène de l’Athénée; il parle de Claudel, et il pleure, tant l’évocation de ce grand poète l’émeut. La salle se tait, figée, la bonne société bourgeoise de Lausanne, embarrassée, ne sait trop comment recevoir ce témoignage à vif, ces propos enflammés auxquels elle n’est guère habituée…. »
Pour lire la lettre, cliquer ici.

Quelques mois plus tard, au mois d’octobre, nous reçûmes un deuxième texte, cette fois-ci consacré aux rapports Henri Guillemin/Charles Péguy.
Pour lire la lettre, cliquer ici.

Puis, à l’occasion de la Nouvelle Année 2022, Catherine Seylaz m’adressa une belle surprise : un échange épistolaire inédit entre Henri Guillemin et une jeune étudiante pleine de fougue qui l’apostrophait vivement au sujet de ses critiques contre Napoléon Bonaparte, dont voici un extrait :
« … les photocopies d’un échange épistolaire datant de 1968 entre son amie Anne Rivier, alors jeune étudiante, et Henri Guillemin, suite à une conférence qu’il venait de donner sur Napoléon 1er….
L’étudiante, avec la fougue de la jeunesse, apostrophait l’historien en lui déclarant son désaccord sur la façon avec laquelle Guillemin avait démoli la statue du héros national.
Guillemin lui répondit aussitôt…
. »

Pour lire la newsletter, cliquer ici

Quelques jours avant le colloque sur Emile Zola (12 novembre 2022), Catherine Seylaz nous a fait parvenir un nouveau texte concernant cette fois-ci Benjamin Constant, personnage qui fait partie des bêtes noires de Guillemin, à côté de George Sand, Alfred de Vigny et quelques autres.

Henri Guillemin, Benjamin Constant et Léonard Burnand. Par Catherine Seylaz-Dubuis.

Editions Perrin – 350 pages – 23 €

 

Léonard Burnand a publié en mars 2022 une ample biographie de Benjamin Constant chez Perrin, sobrement intitulée Benjamin Constant. Léonard Burnand dirige l’Institut Benjamin Constant, sis à l’Université de Lausanne, préside l’Association Benjamin Constant, collabore à l’édition des Œuvres complètes de Constant et préside le comité de rédaction des Annales Benjamin Constant.
Il est par ailleurs professeur d’histoire moderne à l’UNIL (Université de Lausanne), et auteur de plusieurs livres. dont Necker et l’opinion publique (2004) et, en collaboration, Germaine de Staël, l’esprit de liberté (Perrin, 2017).

C’est comme constantien largement reconnu que j’étais impatiente de voir à quelle sauce Burnand allait assaisonner notre Henri Guillemin, dont la détestation de Constant est patente. [cf. Benjamin Constant muscadin – éd. Utovie ; pour en savoir plus cliquer iciN.d.l’E].

Dans son Introduction, Burnand explore « l’image posthume » du personnage, « tout aussi ambivalente que celle qui s’est développée de son vivant1 ». Et il fait une assez large place à Guillemin, qu’il introduit à la suite d’une « prédiction » de François Mauriac, admirateur de Constant  (« Benjamin Constant a des ennemis éternels2 ») : « le redoutable Henri Guillemin s’apprête à descendre dans l’arène pour réactiver la légende noire3. »

Disons tout de suite que les propos de Burnand m’ont surprise par leur modération.
Je m’attendais à une exécution en règle, et certes, les termes « en prétendant révéler », « ces prétendus imposteurs », « une prétendue “conspiration du silence”», accumulés sur quelques lignes, soulignent les sérieuses réserves du chercheur à l’égard de la démarche de l’historien Guillemin. Ce dernier « affectionne le genre du livre “à charge” », « cherche à déboulonner certaines idoles », possède « un tableau de chasse bien garni », « mène contre Benjamin une croisade acharnée […], véritable entreprise de démolition », etc.

Que voici le portrait d’un redoutable prédateur des lettres ! Plus grave, l’accusation de manipulation des sources, mettant en évidence le côté « hautement contestable du point de vue méthodologique » du livre que Guillemin consacre à Constant4 reprend l’essentiel des virulents reproches émis par la plupart des historiens, mais sur un ton toujours très mesuré.
Comme si l’auteur se gardait bien de tomber dans les mêmes outrances que l’on a reprochées à l’essayiste.

Léonard Burnand est né en 1977. Il est titulaire d’une Licence ès lettres (2003) et d’un Doctorat ès lettres (2008) à l’Université de Lausanne.

Par ailleurs, Burnand n’est pas insensible aux côtés séduisants du personnage de Guillemin : « essayiste et conférencier à succès », « fougueux essayiste » ; son livre « incendiaire et outrageusement partial » « ce brûlot », est cependant doté « de verve et d’humour ».

Burnand reconnaît à Guillemin un « talent de pamphlétaire », mais qui a eu « un effet dévastateur pour l’image de Constant auprès d’une partie du public », participant activement à la consolidation de la « légende noire » qui poursuit le personnage.

Les énormes travaux conduits par les historiens dès le début des années 1980 sur l’œuvre de Benjamin Constant ont amené un climat plus apaisé. L’angle « scientifique » sous lequel elle est envisagée désormais suscite des interprétations plus sereines, moins polémiques. « L’histoire, conclut Léonard Burnand, semble graduellement prendre le pas sur la légende. »

L’adjectif « scientifique », orné de guillemets par l’historien lui-même, notons-le, m’a renvoyée à cet article d’Henri Guillemin5, qui éclaire, s’il en était besoin, sa démarche, et pointe clairement ce qui la sépare de la méthode historienne « scientifique ».

A mes yeux, il ne s’agit pas du même « métier », même si Guillemin se considère comme historien (« Le rôle de l’historien est de dénouer les masques et d’arracher les oripeaux6. »).
Sa méthode subjective, affective et émotionnelle (tout en étant basée sur un travail de documentation fouillé), qui dit haut et fort ses amitiés et ses détestations, n’est évidemment pas celle d’historiens tels que Burnand. Certes, « tout critique […] sait parfaitement, dans son for intérieur, ce qu’il pense de l’écrivain qu’il étudie. […] il est loyal, et simplement honnête, d’avouer avec franchise le penchant qu’on éprouve pour l’auteur dont on traite ou l’éloignement qu’il vous inspire7. »

Mais, là où l’historien met en sourdine ses antipathies, le chercheur façon Guillemin leur laisse libre cours : « Je n’aime pas Benjamin Constant. […] Tout compte fait, de tant de documents interrogés, de tant d’écrits lus et relus, l’homme que l’on voit apparaître me glace, m’est odieux8. »

Il en a le droit, mais cela ne fausse-t-il pas un peu la lecture ?

Caricature de Benjamin Constant en caméléon vers 1820 – Bibliothèque de Genève

En conclusion, parmi ces mêmes aveux, cette caricature de Benjamin (on sait que Constant a été abondamment caricaturé par les dessinateurs dans les journaux de l’époque), que Guillemin ne peut s’empêcher d’offrir à ses lecteurs, après quelques douceurs concédées (« Constant écrit admirablement […] Un écrivain du premier rang ») :

« Paix à ses cheveux jaunes, à ses taches de rousseur, son petit ventre rond sous sa poitrine creuse, sa vérole, son air entendu, et sa myopie clignotante. »

Catherine Seylaz-Dubuis

1 Léonard Burnand, Benjamin Constant, Paris, Perrin, 2022, p. 11.

2 François Mauriac, « Quelqu’un ou personne », Le Figaro littéraire, 6 octobre 1956, p. 1 et 7.

3 Léonard Burnand, op.cit., p. 15. Toutes les citations qui suivent : pp. 16-19.

4 Henri Guillemin, Benjamin Constant muscadin (1795-1799), Paris, Gallimard, 1958 ; rééd. Utovie, 2009.

5 Henri Guillemin, « Aveux spontanés », Journal de Genève, 16-17 février 1952, cité par Léonard Burnand, p. 16.

6 Henri Guillemin, « Benjamin l’imposteur », Le Nouvel Observateur, 18 octobre 1967, cité par Léonard Burnand, p. 17.

7 « Aveux spontanés ».

8 Ibid.

Noël est maintenant très proche….

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Qui était vraiment Philippe Pétain ? Henri Guillemin, par un travail exemplaire de démythification historique, dresse le portrait d’une figure emblématique de l’Histoire française.

En mai 1981, Henri Guillemin inaugure une nouvelle série de 12 leçons d’Histoire à travers l’émission Henri Guillemin vous parle diffusée sur l’antenne de la Radio Télévision Suisse (RTS). Il explore toujours son thème de prédilection, celui de la trahison des élites, des gens de biens, à travers le décryptage de grands événements ou de grandes figures historiques.

Après avoir exposé avec brio la traîtrise de Thiers et des Versaillais pendant la guerre de 1870 et la Commune de Paris, Henri Guillemin s’attaque cette fois-ci à Pétain et au gouvernement de Vichy.

Ce coffret est co-édité avec les Éditions Utovie. Il est soutenu par un partenariat avec Les Amis d’Henri Guillemin (LAHG).

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Note réalisée par Edouard Mangin

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Coffret DVD/Livre « Henri Guillemin et l’affaire Pétain »

Jaquette du coffret

Coffret DVD/Livre

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Colloque Henri Guillemin sur Emile Zola

Emile Zola

Dans 6 semaines, le 12 novembre, se tiendra le colloque organisé à l’occasion des 120 ans de la mort de Zola survenue le 29 septembre 1902. Guillemin/Zola, un engagement littéraire et politique.

Les inscriptions sont ouvertes depuis début septembre et la salle Dussane de l’Ecole Normale Supérieure (ENS – rue d’Ulm) continue de se remplir.

Inscriptions – A vos agendas !

Pour découvrir le programme du colloque et effectuer votre inscription, il vous suffit de cliquer ici.
En haut et en bas de la fiche programme, un gros bouton bleu vous amènera directement sur le site dédié à l’achat des places.

Nous remercions les responsables de la Maison Musée Zola Dreyfus de Médan (26, rue Pasteur 78670 Médan) qui ont accepté de relayer nos informations sur la tenue du colloque.
Pour en savoir plus sur la Maison Musée, cliquez ici

Merci pour votre soutien.

Note rédigée par Edouard Mangin

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L’enseignement de l’Histoire en péril

Ce colloque sur l’enseignement de l’Histoire (littéraire, économique, politique) en péril, poursuit et actualise la démarche critique et les travaux d’Henri Guillemin sur le « mensonge scolaire » qu’il dénonce déjà au moment de sa thèse sur Lamartine il y a près d’un siècle : « Ce mensonge qu’on nous a raconté en classe, il est bien probable que d’autres écrivains en ont été victimes ».

L’intervention de Patrick Berthier, qui ouvre le colloque, permet de comprendre comment Guillemin a, par la suite, progressivement dépassé les limites du champ littéraire pour mener ses investigations dans celui de l’Histoire politique en adoptant une démarche d’historien. Ainsi, au sujet de la guerre franco-prussienne de 1870, il parlera de « politique de mensonge assidu ». Par ailleurs, il expliquera son opiniâtre recherche de la vérité par la nécessité de combattre la tromperie.

Edouard Mangin (4ème de couverture)