Philippe Pétain en 1941
Un texte oublié d’Henri Guillemin. Une rareté
On sait avec quelle lucidité Henri Guillemin analysa la vraie nature politique de Philippe Pétain. Dès la fin de la guerre, en 1945, Henri Guillemin publiait, en Suisse où il était réfugié, une étude sur l’arrivée au pouvoir de Pétain intitulé La vérité sur l’affaire Pétain – éd Utovie, livre présenté sur ce site et dont on peut lire le résumé en cliquant ici.
On le sait, cette affaire Pétain, la trajectoire de cet homme, toute importante qu’elle soit sur le plan historique et politique, n’est que la partie émergée d’un iceberg, immense masse sombre de l’Histoire encore bien mal connue.
C’est cette période historique qui sera étudiée lors du colloque du 17 novembre prochain.
Et c’est en préparant son intervention sur le thème : «La prise du pouvoir par Philippe Pétain, décodée par le témoignage du général Jauneaud », que Jean Chérasse a retrouvé dans ses archives, un ouvrage aujourd’hui oublié, dont le titre, plein du souffle d’un Emile Zola, annonce sans ambages son sujet.
Couverture du livre – édition Pygmalion 1977
J’accuse le maréchal Pétain est un livre épuisé mais qu’on peut encore trouver sur les sites internet de vente d’occasion (tel celui-ci : cliquez ici).
Ouvrage posthume publié en 1977, il est l’oeuvre de Jean-Henri Jauneaud (1892 – 1976), brillant Général de l’armée de l’air, qui visiblement règle ses comptes en apportant de nouveaux éléments inédits au sujet de la trahison de Pétain.
Nous en saurons plus le 17 novembre en écoutant Jean Chérasse.
Et quid du texte oublié, une rareté d’Henri Guillemin que je titrai en ouverture ?
Cela ne vous aura pas échappé : la jaquette du livre mentionne en toutes lettres « Préface de Henri Guillemin ».
C’est donc avec grand plaisir que nous publions ce texte rare, une texte court, rageur, qui claque comme un coup de fouet…..et qui donne envie d’en savoir davantage.
Mes remerciements à J. Chérasse pour m’avoir communiqué ce texte.
La préface de Henri Guillemin
Ceci est un livre important, un témoignage considérable.
Il est possible que, dans le détail, des affirmations un peu trop catégoriques s’y glissent, dont je ne dis pas qu’elles sont contraires à la vérité, mais seulement qu’elles manquent encore de preuves formelles pour les étayer et rendre la déposition invulnérable.
Ces preuves verront sans doute le jour, confirmant à plein les assertions de l’auteur, et dissuadant l’adverse qui va s’empresser de clamer, selon le facile adage : « Ab uno disce omnia », autrement dit : sur cette faiblesse, jugez du reste !
Mais l’essentiel demeure, et inentamé. Et où est-il cet essentiel ?
Il est dans la responsabilité, discrète mais infiniment lourde, du maréchal Pétain quant au désastre de 1940.
La certitude grandit peu à peu – et là, les preuves s’accumulent – que, loin de redouter la défaite militaire de la France, le maréchal Pétain tenait l’événement pour favorable à ses desseins et ne faisait rien (bien au contraire) pour l’écarter.
Car le maréchal Pétain a des desseins, des desseins politiques trés précis ; depuis 1934, le maréchal Pétain fait de la politique. Il a ses convictions qui se résument en une âpre haine ; à ses yeux, tout ce qui porte une coloration « de gauche », et particulièrement socialiste, c’est le Mal.
Lisons bien, en pesant les termes, cette confidence qu’il livrait, au mois d’octobre 1938, à un intime : »C’est sous peine de mort qu’il faut changer la politique intérieure » ; mais, ajoutait-il, les Français « n’ont pas encore assez souffert. »
Cette souffrance providentielle indispensable au succès de son entreprise, la catastrophe militaire la fournira au maréchal, lui procurant ainsi et l’occasion et le moyen d’imposer à la France la politique de son choix : une variété de fascisme, du Maurras combiné avec du Salazar.
Comme l’écrira Bernanos avec une lucidité exemplaire : Vichy, c’est « le triomphe d’une minorité impopulaire qui, depuis vingt ans, cherchait en vain sa chance et qui l’a trouvée enfin dans le désastre national. »
La chose est si rude, et surtout de la part d’un maréchal de France, qu’elle suscite l’incrédulité, l’indignation même, comme en présence d’une hypothèse inadmissible, d’une calomnie monstrueuse.
C’est là pourtant qu’est l’Histoire vraie, telle que l’enregistreront les historiens de l’avenir lorsqu’ils pourront traiter de notre destin avec le même détachement que l’on apporte aujourd’hui à conter l’histoire de Sparte ou d’Athènes, de Rome ou de Byzance.
Et l’ouvrage du général Jauneaud prendra place dans la « bibliographie du sujet » parmi les sources d’information les moins négligeables.
Le colloque du 17 novembre 2018
Cette lettre d’information est la dernière avant la traditionnelle pause estivale. Comme les deux précédentes et les suivantes elle s’inscrit dans le cadre du prochain colloque Henri Guillemin que nous organisons en novembre prochain et dont le thème est : la montée du fascisme, Pétain, la débâcle de 40 et la collaboration.
Le colloque se tiendra dans la salle Dussane de l’Ecole Normale Supérieure (ENS) – 45, rue d’Ulm 75005 Paris.
Les inscriptions s’effectueront par Internet, directement à partir de notre site. Elles seront ouvertes le lundi 3 septembre 2018 et se clôtureront la veille du colloque à minuit.
Une lettre d’information sera diffusée à la rentrée, fin août qui présentera le programme définitif et indiquera les détails et les précisions nécessaires pour s’inscrire.
Toutefois, l’avant-programme est disponible ici
Et pour commencer les préparatifs, rappelons que Guillemin a consacré 12 conférences vidéos à cette période historique. Pour les visionner cliquez ici
Ou écouter les conférences du Club 44 sur le même sujet en cliquant ici
Pour aller plus loin cet été avec Guillemin
L’année dernière, à la même date, nous indiquions que Radio France avait rediffusé, un numéro de sa célèbre émission « Les Nuits de France Culture » enregistrée le 25 mai 1985 à l’occasion de la célébration du centenaire de la mort de Victor Hugo. Une émission entièrement centrée sur Henri Guillemin.
Nous avons découvert avec plaisir que cette émission est toujours disponible sur le site de France Culture. On y trouve même d’autres émissions avec Guillemin, sur Arthur Rimbaud, Paul Verlaine, Gustave Flaubert…
Pour les écouter, il suffit de cliquer ici
Très bel été à tous !
Note rédigée par Edouard Mangin