La Commune. Oui la Commune !
Henri Guillemin a écrit plusieurs livres sur la Commune, a donné plusieurs conférences sur cette période emblématique. Tous ses travaux sont disponibles sur ce site.
Mais par où commencer ? Bonne question !
En réponse : nous lançons à partir de maintenant, et jusqu’au colloque de novembre prochain, une série d’extraits des ouvrages d’Henri Guillemin en lien avec cette période historique.
Nous les avons choisis pour leur force évocatrice, pour leur style « droit au but », et parce qu’ils sont de nature à vous donner envie d’aller voir de plus près, par vous-même. (lisez Henri Guillemin !)
Alors, commençons par deux extraits du livre « L’avènement de M. Thiers »
Pour commencer, voici un court passage de la 4ème de couverture (pour l’intégralité cliquez ici)
Henri Guillemin ne porte pas Monsieur Thiers dans son cœur. Il retrace le déroulement de la carrière de cet homme politique que tous les historiens encensent, en démontrant qu’il n’a jamais obéi qu’à une seule préoccupation : défendre les intérêts de la bourgeoisie […/…] [contre les] ennemis de l’intérieur que constituent les ouvriers parisiens et éviter que la contagion ne gagne la province.
Intéressant non ? Mais laissons parler Henri Guillemin.
Premier extrait :
« Dès Sedan et la chute – ce n’est pas trop tôt ! – de l’Empire, Thiers a la réaction saine de tous les « honnêtes gens » : la paix, la paix tout de suite, sous peine des plus lourds périls d’ordre social. Il se félicite de l’action virile menée par les Jules en faveur des « intérêts » sacrés, mais il se garde, en dépit de leurs supplications, d’entrer dans l’équipe gouvernementale. C’est là un commando sacrifié, providentiellement surgi, mais il ne lui convient pas d’associer sa fortune (enfin va sonner l’heure de son avènement) à celle des Favre et autres Picard qui ne peuvent manquer de se couler, nationalement, dans l’indispensable mais fâcheux travail dont ils ont le bon esprit de se charger. Il leur donne sa bénédiction, il les aidera, cela va sans dire, tant est capital ce qu’ils ont à faire, mais il ne se laissera pas confondre avec eux. »(p.71/72)
Second extrait :
» Avant d’avoir conduit la présente enquête, j’ai longtemps cru Thiers responsable de la tragédie [de la Commune]. Ma conviction est faite, maintenant : Thiers n’a pas désiré la guerre civile; il a essayé de l’éviter. Pourquoi ? Par humanité, horreur du sang répandu ? Évidemment non. Ces faiblesses ne sont pas dans son caractère. Il joue contre la majorité un jeu difficile, et c’est dans l’intérêt de ses desseins qu’il redoute un peu ce conflit armé que la majorité royaliste attend, souhaite, exige. (…) M. Thiers n’est pas royaliste, il est thiériste, thiériste et républicain, persuadé que le régime dont il rêve, une « République conservatrice », est le meilleur qui se puisse concevoir pour faire face aux dangers du siècle. »
C’est flou, voici le texte en clair : L’institution parlementaire est la forme de gouvernement la plus aboutie pour assurer l’hégémonie de la bourgeoisie et priver le peuple de sa prétendue souveraineté.
Suite de l’extrait :
[Car pour lui], « Le grand danger vient des pauvres, ces esclaves qui doivent demeurer des esclaves dans une société bien organisée. La République conservatrice est, à ses yeux, très supérieure à la monarchie pour le maintien de l’ordre (…) Dans une république, le pouvoir est l’émanation de la volonté générale, laquelle, dans la réalité, est celle de la majorité des citoyens. Plus d’insurrection, dès lors, qui se puisse faire, théoriquement, au nom de la liberté puisque c’est la liberté elle-même, dans une démocratie, qui fait la loi et désigne le pouvoir. Une insurrection, sous la République, est un attentat contre la République. Prodigieux avantage. Il suffit donc de bien mener, chose facile, le suffrage universel pour disposer, grâce à lui, d’une puissance plénière de commandement (…). Une république occupée, dirigée par les conservateurs est infiniment mieux armée et plus efficace qu’une monarchie pour la protection des possédants. » (p.141/142).
Intéressant non ?
Continuons par un autre extrait tiré de « Réflexions sur la Commune »
Extrait au sujet d’Eugène Varlin, victime propitiatoire de la bourgeoisie triomphante
« Varlin. Vous ne trouverez pas son nom dans le petit Larousse où figure celui de Félix Pyat et qui déborde de politiciens, d’amiraux et de généraux.
Maurice d’Irisson d’Hérisson se découvre, en 1889, devant cette « intelligence d’élite », cet « homme de cœur » et qui subit, au dernier jour, « toutes les tortures qu’au péril de sa vie, il avait voulu [rue Haxo] épargner aux otages. » La plus haute figure de la Commune, ce garçon de trente et un ans, au beau regard attentif, au visage d’apôtre. Une de ces créatures données « qui font de leur activité révolutionnaire la plus grande joie de leur vie. »
Les circonstances de sa mort ne sont pas ce que je les ai crues longtemps, et constituent un des plus sombres drames que mon enquête m’ait fait connaître. Les sévices dont il fut victime avant d’être fusillé – Varlin couvert de horions, de crachats, un œil crevé – ne lui vinrent pas des Versaillais, mais de la foule, à Montmartre. Les gens du quartier où eut lieu son supplice, rue des Rosiers, « rivalisaient de zèle pour dénoncer les insurgés », racontera le Bien Public du 23 juin ; après ce que les soldats avaient fait, le 23, dans cette même rue des Rosiers, se ruer contre n’importe qui était se protéger, se rendre insoupçonnable. Varlin devint le jouet atroce de ces misérables qu’il avait voulu, toute sa vie, secourir.
Le Figaro du 30 mai commenta : »justice a été faite d’un si grand criminel. »(p.292)
Il faut relire Henri Guillemin.
NB de l’éditeur Utovie. « Réflexions sur la Commune » et « L’avènement de M. Thiers » sont regroupés en un seul volume – éd. Utovie;
Les citations sont reproduites avec l’aimable autorisation des éditions Utovie, éditeur exclusif des oeuvres d’Henri Guillemin. Pour en savoir plus sur le catalogue Guillemin et sur Utovie en général, cliquez ici
Des extraits des autres ouvrages d’Henri Guillemin sur la Commune paraîtront régulièrement jusqu’à notre colloque « Henri Guillemin et la Commune » en novembre prochain.
Crédits photos (par ordre d’apparition) :
Barricades de la Commune (domaine public)
Adolphe Thiers (domaine public)
Les Jules [le gouvernement des… ] (domaine public)
Schéma (juste et conforme) de l’oligarchie présente et contemporaine (domaine public)
Photo/portait d’Eugène Varlin (domaine public)
Assassinat d’Eugène Varlin : tableau de Maximilien Luce (1841-1941)© Coll. musée de l’Hôtel-Dieu, Mantes-la-Jolie / Crédit photo : André Morain
A suivre…d’autres extraits bientôt sur le blog…….
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