30 ans de passion et de fidélité
Le 22 janvier dernier, les éditions Utovie nous apprenaient la parution du dernier ouvrage d’Henri Guillemin restant à publier. L’ouvrage Réalité et signification de l’Histoire clôturait une aventure éditoriale démarrée trente ans auparavant.
Ainsi, avec cet ultime ouvrage de Guillemin, Utovie venait de terminer la réédition de la totalité des œuvres de Guillemin, à savoir près de quatre-vingts ouvrages, livres et livres CD d’Henri Guillemin qui sont aujourd’hui disponibles.
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Jean-Marc Carité, directeur des éditions Utovie, accompagnait cette information d’un petit message que nous reproduisons ici :
C’est en 1997 que je signais avec Philippe Guillemin (fils aîné et représentant les héritiers d’Henri Guillemin) le contrat pour la réédition des œuvres complètes de notre historien préféré. Même si nous avions déjà réédité quelques ouvrages, du vivant d’Henri Guillemin, son œuvre restait « exploitée » par ses éditeurs successifs : Gallimard, Le Seuil, Arléa.
A son décès en1992, force fut de constater que ces éditeurs s’en désintéressaient complètement.
Titres épuisés non réédités. Disparition des catalogues. La flamme Guillemin n’étant plus là, il ne fallait pas compter sur eux pour entretenir ce foyer incandescent qui avait enthousiasmé Jean Lacouture : « Apprivoise-t-on une flamme ? Questionne-t-on le feu ? Interroge-t-on un brasier ?»… affirmait-il dans Une certaine espérance.
Je me suis fait de ce travail un devoir quasi filial. En souvenir de mon père, bien sûr, « camarade d’Henri Guillemin » pendant de longues années, depuis Marc Sangnier et le Front Populaire. En fidélité pour Guillemin lui-même dont j’avais découvert, jeune, dans le bureau paternel, les travaux iconoclastes qui m’enthousiasmèrent.
Presque trente années plus tard, je mets un point final à cet immense travail dont je mesure la portée et l’honneur et qui constitue une de mes plus grandes fiertés d’éditeur.
Même si je ne doute pas de la capacité de notre ami Patrick Berthier à dénicher encore quelques pépites, même si nous aurons l’occasion de révéler des écrits de jeunesse laissés dans l’ombre, l’essentiel est là, en tout cas la totalité de ce qui fut publié de son vivant. Il y aura aussi, bien sûr, les actes des futurs colloques organisés par nos amis des associations Présence d’Henri Guillemin et Les Ami(e)s d’Henri Guillemin.
Je vous remercie de l’attention que vous portez à ce travail et de l’écho que vous lui donnerez.
Mais cet immense travail éditorial méritait beaucoup plus qu’une annonce rapide autant que modeste. Il était nécessaire qu’on en connût tous les détails. Et puisqu’il s’agit d’une sorte d’aventure, il nous fallait le récit détaillé de ce long voyage, plein de passion et d’opiniâtre labeur.
Jean-Marc a donc pris la plume pour nous donner à lire aujourd’hui le récit de cette aventure haute en couleurs : un ouvrage de 24 pages, intitulé Editeur d’Henri Guillemin par passion et fidélité. Un récit illustré de photos, de documents et surtout de manuscrits inédits de Henri Guillemin.
Extraits
Pourquoi être l’éditeur d’Henri Guillemin : par passion et fidélité
Avant 18 ans, déjà, j’ai découvert Henri Guillemin par ses livres que Gallimard adressait en service de presse à mon père, Maurice, qui fut toute sa vie également critique littéraire. Tous deux s’étaient rencontrés chez Marc Sangnier dans les années 30, au moment de Jeune République (qui succéda au Sillon) et du Front Populaire.
Il y eut une grande fidélité réciproque. Mon père chroniquant régulièrement les livres d’HG dans ses collaborations diverses avec un échange épistolaire suivi.
Deux dédicaces en témoignent : l’une pour la première édition du Flaubert devant la vie et devant Dieu, l’autre pour la première version de son livre sur la Révolution de 1848.
Dire que je suis tombé dans la marmite enfant serait exagéré sans doute. Mais, enfin, avant de devenir éditeur, un de mes premiers « vrais » articles fut consacré à sa Jeanne d’Arc.
Le virus dès lors était à l’œuvre.
Succédant à mon père, mais dans d’autres publications, je recensais les nouveaux livres d’Henri Guillemin. Jusque dans une revue que j’avais fondée : « Tripot » (revue « mal famée ») et que j’éditais depuis 1974 avec Marie Fougère.
En 1977 nous lui rendons visite à Neufchâtel en Suisse pour préparer un numéro spécial de cette revue, le numéro 20 « Avec Henri Guillemin ».
Plusieurs heures d’entretien. Un repas simplement partagé. Un petit clopet pour lui. Reprise. Puis visiblement (Jacques Bertin eut la même impression une décennie plus tard), il en avait déjà assez dit, le travail l’attendait… Et, justement, nous avions un train à telle heure, ce serait dommage de le rater. De toute manière le charme et la force de conviction avaient opéré.
Nous ramenions cet enregistrement comme un trésor que nous avons publié, très largement revu et corrigé (voire expurgé) par HG lui-même, dans cet hommage « Avec Henri Guillemin ».
Nous y reprenions aussi son texte « Rappelle-toi, petit » qui raconte le coup d’Etat de Napoléon III vécu dans un petit village du mâconnais.
Que nous avons édité l’année suivante dans notre collection « Jeunesse ».
Modeste début, certes, mais début tout de même de l’édition de son œuvre.
Et nous lui avions demandé : « si l’occasion se présente de rééditer certains de vos livres épuisés… ? »
Sans hésiter il nous répondit : « Allez-y, tout ce que vous voulez ! Allez-y ». Un peu plus tard il m’écrivit : « Pour Utovie, liberté absolue ! ».
Dès lors, nous nous sommes enhardis et lui avons proposé chaque fois que cela nous semblait possible de rééditer ses ouvrages parus hors « grandes » maisons et épuisés sans reprise envisagée.
Et c’est parti ! Comme dans un vaisseau sortant du port tranquille, nous sommes embarqués pour une traversée relatant trente années d’opiniâtre labeur et d’indéfectible amitié, affrontant vents et marées, bonnes et mauvaises nouvelles, émotion et déception, et toujours à bord, la passion d’entreprendre et la volonté de réussir.
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