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Henri Guillemin à la TV française en 1968. 3ème épisode.

Comme annoncé, voici la troisième et dernière partie de cette incroyable émission TV de trois heures, « L’invité du dimanche », réalisée à l’ORTF en décembre 1968 par l’artiste Raoul Sangla et consacrée à Henri Guillemin.

Comme la fois précédente, compte tenu de l’impossibilité de mettre en ligne sur Youtube la vidéo et ainsi pouvoir la mettre directement dans la newsletter, cette fois encore, il faut suivre le procédure décrite ci-après pour pouvoir regarder Henri Guillemin, l’enregistrer, et continuer à le regarder sans entraves.

1/ Cliquez sur le lien ci dessous

https://www.grosfichiers.com/tKzeCiNu5WM

Observation importante : ce lien a une durée de vie limitée. Il sera désactivé dans 14 jours, exactement le 17 janvier prochain à 15h25. Il faut donc impérativement lancer la procédure de telechargement avant cette date.
Conseil : dès réception de cette newsletter.

2/ Cliquez sur le lien « Guillemin 3 mov »

3/ Si une publicité apparaît, revenez en arrière et recommencez en cliquant à nouveau sur « Guillemin 3 mov »

4/ Le téléchargement sur le disque dur de votre ordinateur commence. La vidéo est lourde et pèse 4,6 Go. En fonction de la qualité de votre équipement informatique, cela prendra entre 10 et 20 minutes.
Dès qu’elle aura été entièrement téléchargée, vous la garderez éternellement.

La magie de cette troisième partie prolonge celle des deux épisodes précédents.
Ce troisième volet est consacré à Emile Zola et à la manière d’écrire l’Histoire et se termine par la poésie.

Ouverture par un long plan séquence de 3’32 au cours duquel, la caméra, par un pano travelling qui ressemble au vol d’un papillon ivre de liberté, s’attarde sur le pianiste, le piano, le clavier, puis s’envole vers le batteur, tournicotte autour de lui avant d’aller voir de plus près comment joue le contrebassiste. Et nous redécouvrons le pianiste. Soudain, Henri Guillemin surgit plein cadre. Sa main gauche soutient son front. Il a l’air très concentré sur les musiciens et la musique jazz dont la forte présence donne ce climat très particulier depuis le début.

A 3’33, cut et gros plan sur le visage de Guillemin. C’est le début d’un échange érudit et contradictoire, plein d’extrême courtoisie, entre Henri Guillemin et l’écrivain Armand Lanoux à propos des interprétations singulières de Guillemin sur l’écrivain Emile Zola.

Guillemin lance : « Nous n’allons pas être absolument d’accord ! mais sur quel point vous vous opposez à ma théorie ? »

Et c’est parti.

Plus tard, l’échange se poursuivra avec le grand spécialiste de Zola, Henri Mitterrand, non plus sur l’écrivain Zola, mais sur l’engagé politique et l’affaire Dreyfus.

Plus tard encore, on écoutera un savoureux échange entre Henri Guillemin et Alain Decaux à propos de la manière d’écrire l’Histoire, où l’on repèrera immédiatement l’engagement politique de Guillemin.

Enfin, l’émision se termine sur la poésie. Charles Trenet chante.

Bon visionnage.

Couverture de la bande déssinée jeunesse parue en 2020 aux éditions Rue de l’Echiquier.
48 pages. 4,50 €. Clin d’oeil ironique à l’eau-forte du 18ème siècle.

Fêtes de fin d’année obligent, rien de nouveau n’est intervenu depuis notre dernière lettre. Nous attendons les réponses aux dernière sollicitations lancées juste avant les fêtes.

A suivre….

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Henri Guillemin à la TV française en 1968. 2ème épisode.

Henri Guillemin en pleine conférence. Photogramme de l’émission « L’invité du dimanche » ORTF 1968. Doc INA.

Comme annoncé dans notre dernière newsletter du 14 novembre, voici la deuxième partie de cette incroyable émission TV de trois heures, « L’invité du dimanche », réalisée à l’ORTF en décembre 1968 par l’artiste Raoul Sangla et consacrée à Henri Guillemin.

La troisième et dernière partie sera diffusée début janvier 2025.

Comment regarder cette deuxième partie ?

Contrairement à la précédente mise en ligne via Youtube qui rendit possible d’installer directement la vidéo dans la newsletter, cette fois, nous avons dû agir autrement. En effet, les algorithmes Google et Youtube, ces logiciels espions fureteurs, ont empêché le telechargement de la vidéo de l’INA sur Youtube. Qu’il n’y eut aucun problème la fois dernière restera un des nombreux mystères de la blogosphère.

Heureusement, nous avons plus d’un tour de magie.
Voici la procédure de contournement à suivre pour pouvoir regarder Henri Guillemin, l’enregistrer, et continuer à le regarder sans entraves.

1/ Cliquez sur le lien ci dessous

https://www.grosfichiers.com/wWzxMKEEnad

Observation importante : ce lien a une durée de vie limitée. Il sera désactivé dans quelques jours, exactement le 23 décembre prochain. Il faut donc impérativement lancer la procédure de telechargement avant cette date.
Conseil : dès réception de cette newsletter.

2/ Cliquez sur le lien « Guillemin 2 mov »

3/ Si une publicité apparaît, revenez en arrière et recommencez en cliquant à nouveau sur « Guillemin 2 mov »

4/ Le téléchargement sur le disque dur de votre ordinateur commence. La vidéo est lourde et pèse 4,4 Go. En fonction de la qualité de votre équipement informatique, cela prendra entre 10 et 20 minutes.
Dès qu’elle aura été entièrement téléchargée, vous la garderez éternellement.

La magie de cette deuxième partie prolonge celle de la première. Pendant une heure, nous découvrons un véritable trésor, tant par les propos tenus entre Henri Guillemin (rappelons, que pour cette émission, il a invité trois séries de trois personnalités francophones : québécoises, suisses et belges. Toutes n’ont pas pu venir mais l’équilibre est assuré), que par la mise en scène.
Par exemple, la complète et incroyable absence de l’animateur au profit des seuls invités. Elégance et respect vis à vis du téléspectateur.
Tout le contraire d’aujourd’hui où l’animateur est ce roitelet narcissique faisant le pitre pour exister, les invités essayant d’imiter le carton-pâte.

Ouverture sur un gros plan montrant le clap et son inscription manuscrite « L’invité du dimanche ». Quand le clap est retiré, on découvre, toujours en très gros plan, le visage de Jacques Brel en train de fumer.

La bande son est sa propre chanson « Le plat pays », cette chanson plus qu’émouvante, dont on entend bien les paroles. Brel, toujours en gros plan, écoute l’air très concentré, voire soucieux, comme s’il se découvrait pour la première fois en train de chanter.

Ce début d’émission est étrange pour nous aujourd’hui. Bien sûr, de façon évidente, par son style, son esthétique, complètement hors des normes de la société du spectacle de 2024.
Mais il y a autre chose qui travaille insidieusement : au delà d’une nostalgie sentimentale, s’agite le sentiment diffus d’une perte. Une perte de nature politico philosophique : le peuple téléspectateur, ouvrir son champ de conscience ou l’abrutir ?

Cut/gros plan sur le visage de Guillemin, très concentré lui aussi.

Un panoramique à droite nous ramène sur Brel, qui se ronge le pouce. Puis un panoramique à gauche nous fait découvrir le visage de la romancière belge flamande Françoise MalletJoris.

La chanson de Brel « Le plat pays » continue de dérouler son poème.

Il ne s’est pas passé deux minutes, exactement 1,35 minute, et nous sommes envoûtés, complètement parmi eux. Ce qui nous autorise à nous poser cette question : pourquoi donc sont ils tous les trois aussi sérieux et concentrés, voire tristes à l’écoute de Le plat pays 

« Belle chanson belge ! » lance alors Henri Guillemin.
« Chanson flamande ! » rétorque Jacques Brel.

S’en suit une discussion entre eux trois.
On vous laisse découvrir la suite.

A noter : entre la 7ème et la 14 ème minute, on ne peut que savourer, chacun avec ses propres convictions en la matière, mais avec le plus grand plaisir, les échanges sur la foi, dieu, la religion, etc… entre le poète Brel, foncièrement athée, matérialiste convaincu, et Guillemin, quelque peu interloqué, dont on connaît la position sur ces sujets.

Bon visionnage.

Un paysan portant un prélat et un noble. Symbole du Tiers Etat écrasé par le clergé et le noblesse d’Ancien régime. Eau-forte en couleurs, Paris, 1789. Musée Carnavalet.

L’organisation de ce nouveau colloque avance avec opiniâtreté et de façon heureuse.
Nos immenses remerciements vont aux adhérents et abonnés qui nous ont exprimé leur amical soutien pour ce projet, nous ont procuré de nombreux contacts utiles pour monter ce prochain colloque.
Merci pour votre aide et votre soutien pour dans cette nouvelle action publique d’actualisation des travaux d’Henri Guillemin, cette rare voix instructive permettant d’y voir clair aujourd’hui.

Rappelons notre propos pour les nouveaux internautes.

Henri Guillemin présentait d’un côté, les « Gens de Bien».
Bien avec un « s », son jeu de mot favori pour souligner que le vocable « Bien » n’avait nul rapport avec l’éthique chrétienne, mais avait au contraire pleins rapports nourrissants, forts et durables avec la Richesse sous toutes ses formes et à travers tous les moyens pour la garder, l’accroître, même au prix des pires trahisons et compromissions.

Exemples historiques édifiants : Révolution française, La Commune, « L’autre avant – Guerre », c’est à dire les complots contradictoires de l’Oligarchie impérialiste bourgeoise transnationale, cette cause toujours impunie du massacre populaire de la Première Guerre Mondiale ; Pétain et la collaboration des classes oligarchiques, et….et… toujours de nos jours.

Et, d’un autre côté, Henri Guillemin présentait les « Gens de rien ou de peu », à savoir la très grande majorité des peuples : les travailleurs, seuls créateurs de valeurs, continuellement exclus du bonheur de leur propre production.
Clairement les dindons de la farce bourgeoise.

Colossale injustice, ineffable inéquité, invariant historique?

A la suite d’Henri Guillemin, il est légitime de se poser la question de savoir ce qu’il en est aujourd’hui des nouveaux mécanismes d’asservissement et d’appauvrissement subis par les Gens de rien ou de peu.
Et, dans une sorte de parralélisme des formes, il est tout aussi légitime, voire éducatif, d’ôter le mystère qui entoure aujourd’hui les Gens de Biens, c’est à dire les Riches, les Hyper Riches, et ainsi révéler le dessous des cartes, pour employer une des expressions favorites d’Henri Guillemin.

Quelle est la réalité de cette inégalité généralisée ? Comment fonctionne le Silence aux pauvres en 2024 ?

Couverture de la bande déssinée jeunesse parue en 2020 aux éditions Rue de l’Echiquier.
48 pages. 4,50 €. Clin d’oeil ironique à l’eau-forte du 18ème siècle.

Concernant le prochain colloque de l’automne 2025, le travail est intense. Intense, car le sujet est brûlant. Ce travail d’organisation est toujours en cours. Nous continuons la recherche des intervenants correspondants au message général que nous souhaitons délivrer.

Cinq grandes personnalités, économistes, sociologues, philosophes ont déjà confirmé leur participation à ce projet. Elles sont éparties sur les deux grands axes du colloque. D’autres sont en attente d’une meilleure visibilité de leur agenda.

Parallèlement, l’affinage des thèmes à traiter continue de s’enrichir, tant ceux concernant les Gens de biens, à savoir la classe des riches, voire des hyper riches, que ceux portant sur les Gens de rien ou de peu, à savoir les travailleurs et les conditions de leur travail.

L’architecture générale de la journée est inchangée (le relire, cliquez ici).

Henri Guillemin écoutant Romain Bouteille

Prochain épisode, 3ème et dernière partie de l’émission : début janvier prochain.

 

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Henri Guillemin à la TV française en 1968. Une rareté, une pépite. 

Henri Guillemin en pleine conférence. Photogramme de l’émission « L’invité du dimanche » ORTF 1968. Doc INA.

Après une trêve estivale plus longue qu’à l’ordinaire, au lieu du septembre habituel, c’est le mois de novembre qui accueille aujourd’hui la reprise de nos travaux.

Ce léger retard est simplement dû au surcroît de travail d’études et de recherche généré par vos sollicitations et propositions d’actions concernant la position d’Henri Guillemin par rapport à l’injustice sociale, devenue hurlante aujourd’hui.

Cette question, aussi logique que légitime en ces jours, a naturellement fait surgir l’un des fils rouges de l’œuvre d’Henri Guillemin sur ce sujet, à savoir l’invariant de l’Histoire moderne, ce rapport de classe entre dominants et dominés.
Henri Guillemin présentait d’un côté, les « Gens de Bien» Bien avec un « s », son jeu de mot favori pour souligner que le vocable « Bien » n’avait nul rapport avec l’éthique chrétienne, mais avait au contraire pleins rapports nourrissants, forts et durables avec la Richesse sous toutes ses formes et à travers tous les moyens pour la garder, l’accroître, même au prix des pires trahisons et compromissions (exemples historiques : Révolution française, Pétain, La Commune… et toujours de nos jours), et d’un autre côté, les « Gens de rien ou de peu », à savoir la grande majorité des peuples, non seulement dominés et exploités, continuellement dupés et trompés. Clairement les dindons de la farce bourgeoise.


Un paysan portant un prélat et un noble. Symbole du Tiers Etat écrasé par le clergé et le noblesse d’Ancien régime. Eau-forte en couleurs, Paris, 1789. Musée Carnavalet.

A partir de ce rapport de classe, spécifié de façon lumineuse par Guillemin dans les années 70/80, nous nous sommes posés la question : qu’en estil en 2024 ? Soit cinquante après ?

Car en 2024, les choses ont fortement changé. Un tour d’horizon sur la situation d’aujourd’hui donne le vertige. Quels sont, aujourd’hui, les nouveaux visages de ces « Gens de biens ». On sait qu’ils participent d’un système transnational, financier, ultra minoritaire et pour autant déterminant. Mais qui sont-ils, où sont-ils en réalité. Quelle est l’histoire de leur domination, d’où viennent ils ? Et comment opèrent-ils ? Quelle est la vraie réalité de l’ultra libéralisme dont ils sont issus ?

De même, dans la société ultra libérale, quels sont les nouveaux mécanismes d’asservissement subis par les Gens de rien ou de peu ? L’appauvrissement des dominés, qui vont des subalternes aux classes moyennes, n’opère pas seulement sur le plan salarial, économique et professionnel. Il travaille aussi en profondeur les domaines intellectuels, culturels, éducatifs, informationnels, sociaux et politiques, en fait, tous les domaines de la vie sociale.

Quelle est la réalité de cette inégalité généralisée ? Comment fonctionne le Silence aux pauvres en 2024 ?


Nouveaux plans ambitieux. 2005. Tableau de Jules de Balincourt, artiste peintre né en 1972. Huile sur toile 102 x 152cm. Collection privée.

Représentation d’un parlement du mal : des chemises empesées et des visages roses, l’ordre des affaires mondiales est sombrement décrit comme s’apparentant à une table de craps pour abstinents.

Comme il était impossible de traiter tous ces thèmes en un seul colloque d’une journée, nous avons opté pour la mise en lumière du rapport Gens de Biens/Gens de rien dans le monde du travail, lieu primordial de la société capitaliste, puisque le travail reste le point nodal d’où est issue toute valeur et tous rapports de production, donc de classes.

Pour être complet, il faudrait traiter les autres thèmes, un par un, à travers une série de colloques sur plusieurs années, cinq, six, ce qui formerait œuvre globale. C’est notre intention. Nous verrons.

La sélection des intervenants pour le premier colloque de cette série, celui qui est programmé à l’automne 2025, plus précisément soit début octobre, soit début novembre est en cours et ne peut donc pas encore être dévoilée.
Cependant, en voici l’architecture générale.

Une introduction du président suivie d’une nouveauté : un document vidéo inédit réalisé à partir d’extraits des conférences vidéo d’Henri Guillemin sur le thème du colloque. C’est un défi technique que nous nous sommes lancé et espérons réaliser.
Une matinée d’interventions consacrées à la réalité socioprofessionnelle chez les gens de rien ou de peu ; les victimes de l’ultra libéralisme.
Une après midi consacrée à montrer le vrai visage des classes riches et hyper riches
Une conclusion philosophique ouvrant vers des pistes d’espoir.

On vous tient informés des étapes d’avancement de ce grand projet.

C’est en préparant cet ensemble de colloques que nous avons découvert cette première vidéo : une petite interview d’Henri Guillemin à la RTBF (Radio Télévision Belge Francophone) datant de 1980.

Vous verrez, à 1, 20 mn, répondant à la question du journaliste qui déplore qu’il ne passe pas à la TV française, Guillemin réagit aussitôt en citant une grande émission datant de 1968, dont il fut l’invité. Cette émission fut la dernière car Guillemin fut ensuite évincé de la TV française par Pompidou qui le détestait. Il y reviendra plusieurs dizaines d’années plus tard.

Quelle était cette fameuse émission de décembre1968 ?

Après de longues recherches, nous l’avons trouvée parmi les archives de l’INA. Il fallut ensuite tout paramétrer et mixer le document vidéo pour qu’il soit le plus lisible et audible et en adéquation avec les contraintes technologiques d’aujourd’hui.

Il s’agit d’une émission de trois heures datant de décembre 1968, intitulée « L’invité du dimanche ». Cette émission réunit de très grands noms.

La productrice s’appelle Éliane Victor (1918 – 2017) pionnière à l’ORTF, qui deviendra célèbre et obligera le respect par ses émissions sur les femmes, dont « Les femmes aussi » . Pour en savoir plus sur Eliane Victor, cliquez ici

Le réalisateur s’appelle Raoul Sangla (1930 – 2021). C’est un des très grands réalisateurs du début de la télévision aux côtés de Jean-Christophe Averty, Claude Santelli, Jean Prat ou Stellio Lorenzi. Membre du parti communiste, il fut évincé par Pompidou et ne reviendra à la télévision française qu’après mai 1981 pour y réaliser le mythique « Journal d’en France »

Notons à cette occasion que Jean Chérasse, fidèle adhérent, qui a travaillé avec Guillemin sur ses deux grands films : Dreyfus ou l’Intolérable Vérité (prix Méliès) et La Prise du pouvoir par Philippe Pétain, connaissait très bien Raoul Sangla dont il admirait le talent et la vaste culture.

Pour en savoir plus sur Raoul Sangla, cliquez ici.

Comme l’émission dure trois heures, nous la mettrons en ligne en trois newsletters. Aujourd’hui le premier épisode.

Il est impossible d’imaginer à la télévision d’aujourd’hui, une émission si intense et innovante, tant par son sujet, sa durée, sa mise en scène, que par son écriture proprement cinématographique. A l’époque, la TV était encore un medium d’éducation populaire et d’enrichissement culturel.

Quelques mots de description avant que vous y plongiez.

Incroyable début : sur fond de musique de jazz, d’un gros plan sur les mains d’un contrebassiste, un zoom arrière nous montre le visage barbu du musicien.
Coupe.
Plan suivant sur une sorte de drôle de statue.
Apparaît le titre de l’émission, puis un panoramique vers la gauche capte en gros plan le front de quelqu’un, et bientôt de grosses lunettes noires que les connaisseurs ont déjà reconnues.

Eh oui, c’est Henri Guillemin qu’un zoom arrière conjugué à une montée en plongée, comme une belle arabesque, nous dévoile, debout, accoudé à un piano.
Il a l’air sérieux, concentré sur la musique. Il est là, tout seul, comme dans un bar américain.

La caméra continue de peindre par ses panoramiques, travellings et ouvertures de champ. De haut, elle nous fait maintenant découvrir le plateau de l’émission. D’abord les autres musiciens, puis une estrade pour le futur entretien avec Guillemin qui est filmé de profil, de trois quart dos (images inédites de lui puisque c’est toujours de face qu’on le voit à travers ses conférences vidéo), puis, surprise, apparaît dans le champ trois types en train de discuter debout en fumant près des coulisses.

Et là, on est obligé d’être intrigué, car ils regardent Guillemin qui, à l’opposé, est resté seul, accoudé au piano et dont certains plans rapprochés montrent qu’il a entamé une intense discussion avec le pianiste.
Il ne se passe rien d’autre, juste l’alternance de plans entre Guillemin « au piano » et, à l’autre bout du plateau, les trois gaillards que le son nous apprend qu’ils discutent de…… Guillemin.

Incroyable scène, incroyable ambiance qui va durer un petit quart d’heure ! Car ce n’est qu’à la douzième minute passée que l’animateur vient enfin vers Guillemin pour le saluer (plan séquence génial à partir de 12’ 41) et l’entraîner lentement vers l’estrade où l’on pense qu’enfin un débat va s’ouvrir.

Eh bien non ! Pas encore !

Mais arrêtons là pour vous laisser la surprise de la suite qui commence très fort à la seizième minute : Guillemin sur scène. La passion faite homme. Son plaisir gourmand. Un showman exceptionnel.
Celles et ceux qui ont assisté aux conférences de Guillemin jubileront.

L’émission dure trois heures. Trois heures de plaisir teinté de nostalgie. Nous la diffusons en trois fois une heure.
Aujourd’hui, le premier épisode.

Bon visionnage.

NB. L’équipe qui anime l’association réunit une poignée de camarades. C’est l’un deux, Michel Le Thomas, dont la carrière comme producteur et réalisateur lui a permis de travailler avec des pointures comme René Vautier (1928 – 2015), qui a trouvé ce document précieux et l’a remis aux normes techniques. Pour en savoir plus sur lui et ses réalisations, cliquez ici.

Prochain épisode, 2ème partie de l’émission : début décembre prochain.

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14 juillet 1789 : leçons d’Histoire

Caricature des trois ordres. Eau-forte en couleur imprimée à Paris sans nom en 1789 – Musée Carnavalet Paris – Couverture de la première édition chez Arléa, mai 1989. Réédition chez Utovie en 2012.

Gens de biens, gens de rien

A travers cette expression en forme de jeu de mot, qui constitue l’un des fils directeurs traversant l’ensemble de ses travaux, Henri Guillemin a toujours projeté une lumière crue et directe sur cet invariant historique : les rapports de classes, donc de force, entre les possédants, ceux qui ont des biens, une minorité, et ceux qui n’en ont pas ou très peu, la majorité. Il dénonçait aussi avec la même vigueur l’acharnement déployé par les classes dirigeantes pour sauvegarder et même accroître leurs richesses, utilisant pour cela un arsenal de stratagèmes, mensonges et compromissions dirigés contre le peuple pour le déposséder des moyens nécessaires permettant d’établir une justice sociale et politique légitime.

Cette dénonciation, Henri Guillemin la développa avec une singulière colère en 1989 au moment des festivités du Bicentenaire dans Silence aux pauvres ! Un libelle au titre clair et sans ambages. (Pour aller dans la bibliothèque, cliquer ici)

Avec cet ouvrage, Guillemin mit un bon coup de pied dans le consensus mou qui présidait alors aux festivités totalement inspirées par les écrits de l’historien alors en vogue, François Furet, auteur de Penser la Révolution française. Dans ce livre, en effet, Furet s’opposait frontalement à l’historiographie universitaire jusque-là ancrée à gauche, reposant entre autres sur les travaux d’Albert Mathiez, Georges Lefebvre, et Albert Soboul.
Sa thèse cherchait à montrer que la Révolution française n’était que la matrice des totalitarismes modernes. Dans le contexte géopolitique de la fin des années 1980 marqué par la chute de l’URSS et le triomphe du néo-libéralisme, Furet, ancien communiste, se coula avec une étonnante rapidité dans le moule de la pensée dominante, ce qui lui valut en retour gloire et célébrité ; l’élémentaire vérité historique passant au second plan ; une tactique toujours en vogue aujourd’hui.

Silence aux pauvres !, si Guillemin ne le nomme jamais, il cherchait clairement à démonter les thèses de Furet en s’opposant avec la plus grande vigueur au consensus contre-révolutionnaire de l’époque qui visait à faire passer la période emblématique 1792–1794 pour un malencontreux et déplorable dérapage.
Ainsi, fidèle à son indéfectible engagement, Guillemin contredisait les idées dominantes, à la fois médiatiquement et politiquement.

Qu’on en juge sur pièces et laissons la parole à Henri Guillemin.
Voici, ci-dessous la retranscription de son avant-propos. (Les références de pagination sont celles de l’édition Arléa)

J’avais pensé à Eloge des vaincus. Mais il fallait avoir lu mon petit texte pour comprendre ce titre-là : les vaincus ? Ceux que liquida le 9 thermidor, avec, en quarante-huit heures, la plus belle fiesta de la guillotine, plus de cent dix têtes coupées le 10 et le 11. Ceux qui avaient cru en la Révolution, en une révolution où non pas seulement seraient changées les structures, mais d’abord et avant tout serait modifié le regard de l’homme sur la vie, et l’emploi de ses jours. Immédiatement limpide, en revanche, ce titre : Silence aux pauvres !

Deux raisons m’ont comme poussé par les épaules pour me dicter ce…..quoi ? Dirai-je, à la cuistre, ce précis des événements qui se déroulèrent chez nous de 1789 à 1799, ce résumé didactique de la Révolution ?
Premier mobile : l’état violent d’ « insupportation » (ce néologisme est de Flaubert) que je dois à l’étalage tintamarresque et péremptoire d’une doctrine où la Révolution, d’une part, se dilue sur près d’un siècle, et d’autre part – c’est ça la grande trouvaille – dérape (tel est le mot-clé, le mot de passe, le label d’initiation), dérape, oui, très vite ; dès la Législative, le mal est fait ; autrement dit, la sagesse eût été un gouvernement à la Louis-Philippe. Et donc la République relève d’un dérapage. Pas mal, non, pour le Bicentenaire ? Original en tout cas.

L’autre mobile qui s’est emparé de mon stylo pour lui donner la fièvre, c’est l’affaire de la Propriété, dont je trouve qu’on l’oublie un peu trop dans les récits et commentaires usuels sur la Révolution. Ce qu’il faut savoir, et capitalement, c’est que, dès la réunion des Etats généraux, une grande peur s’est déclarée chez les honnêtes gens – formule, je crois bien, que nous devons à La Fayette ; honnêtes gens = gens de bien, gens qui ont du bien, des biens ; au vrai, les possédants, face à ceux que l’on va exclure du droit de vote et de la garde nationale, les non-possédants, les gens de rien.
Robespierre est un des rares – des très rares – révolutionnaires à souhaiter chez les exploités (des champs et des villes) une conscience-de-classe. Il n’y parvient pas. Trop tôt. Attendons l’expansion industrielle du siècle suivant et les concentrations de prolétaires.
En revanche, chez les gens de bien, elle est là, dès 89, la conscience-de-classe, vivante, je vous l’assure, lucide, effarée, agressive ; il n’est, pour s’en rendre compte à ravir, que de regarder et d’écouter madame de Staël, Sieyès, Barnave et cent mille autres. Et tout va se jouer sur ce sujet même, avec l’épouvante (croissante pendant plus de cinq ans) de ceux qui ont en présence de ceux qui n’ont pas, qui n’ont rien et qu’il s’agit à tout prix (et constamment) de surveiller et de contenir d’abord par le déploiement avertisseur de la force, le 14 juillet 1790, ensuite par son usage crépitant et persuasif, le 17 juillet 1791.

Les trois assemblées qui vont gouverner jusqu’au Directoire : l’Assemblée nationale, la Législative, la Convention, seront toutes les trois – la Convention aussi – composées de propriétaires.
La première, au lendemain des émeutes rurales de juillet 1789, aura soin de doter la Propriété d’un attribut inédit, renforcé, solennel. Et nous admirerons Danton, le jour même où la Convention tiendra sa première séance, apportant au soutien de la fortune acquise un adverbe inattendu, et grandiose (*). Odieux, intolérable, ce Robespierre qui ose, en avril 1793, proposer une limite officielle au droit de propriété. Il est fou ; un malfaiteur, un anarchiste.(**)

Enfin, les honnêtes gens vont respirer le 9 thermidor. Quelle délivrance ! Ne s’est-on pas risqué, au Comité de Salut public (automne 93), à intervenir dans l’ordre économique – établissement d’un maximum pour les prix des denrées – alors que le dogme des Girondins comportait une abstention rigoureuse, absolue, de l’État en ce domaine. C’est la Convention – eh oui ! Elle-même -, ayant repris son vrai visage et jeté le masque qu’elle s’imposait par effroi des robespierristes, qui va saluer d’acclamations Boissy d’Anglas énonçant, à la tribune, cette vérité fondamentale : « un pays gouverné par les propriétaires est dans l’ordre naturel ».

Imparfaite, insuffisante, la rectification thermidorienne. Le principe républicain subsiste, redoutable en soi quant à l’essentiel. Brumaire fermera la parenthèse sinistre ouverte par le 10 août 92 et le suffrage universel. Plus d’élections du tout, ni de République, mais le bonheur, la béatitude reconquis par Necker et ses amis banquiers.
A la niche, une bonne fois, les gens de rien.

(*) Ce passage est explicité page 90 :
« La Convention a tenu sa première séance le 21 septembre, et Danton prononce un discours où figurent les mots-clés qu’exige le moment : « Peuple français, sois rassuré ! Voici la République. Tu n’as que des bienfaits à attendre d’elle, et quant aux propriétés, quelles qu’elles soient, elles seront éternellement respectées, protégées ». Cet adverbe est inusuel dans la langue juridique. Mais, pour l’apaisement des esprits au lendemain d’une aventure pareille à celle du 10 août, rien ne saurait être excessif dans la solennité des promesses concernant la fortune acquise, sa liberté d’accroissement et sa pleine sécurité. »

(**) Ce passage est détaillé page 99 :
« En ce même mois d’avril 93, Robespierre horrifie les honnêtes gens en réclamant, dans la nouvelle Déclaration des droits de l’Homme, l’insertion d’un article qui limiterait le droit de propriété. L’argumentation de Maximilien est toute simple : vous n’avez pas aboli l’esclavage dans nos colonies, la traite des Noirs subsiste ; demandez à un négrier ce qu’est ce bateau (« je me trompe, disait Robespierre, ce cercueil flottant ») dans lequel sont entassés des hommes, des femmes et des enfants à la peau noire et dont beaucoup meurent en route, il vous répondra calmement : « Ceci est ma propriété ». Eh non ! Nul homme ne saurait être propriétaire d’un autre homme. De même que la liberté a pour limite la liberté d’autrui, de même il faut que la loi interdise tout usage du droit de propriété qui porterait atteinte à la vie ou à la dignité d’êtres humains.
Robespierre a touché à l’Arche, l’arche sainte, cette Propriété devenue sacrée depuis le 26 août 1789. Il a commis le crime que la Convention ne peut tolérer ; elle décidera donc, contre lui, que l’article concernant la propriété sera rédigé – voté – comme suit : « Le droit de propriété est celui de jouir et de disposer à son gré de ses biens ». A la bonne heure. »

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En 2024, les choses ont-elles fondamentalement changé ? Un tour d’horizon sur la situation d’aujourd’hui donne immédiatement la réponse.
C’est pourquoi, à la suite d’Henri Guillemin, il est naturel de se demander quels sont les nouveaux visages de ces gens de biens. On sait qu’ils participent d’un système transnational, financier, ultra minoritaire et pour autant déterminant. Mais qui sont-ils, où sont-ils en réalité. Quelle est l’histoire de leur domination, comment opèrent-ils ?
De même, il est pareillement légitime de connaître les nouveaux mécanismes d’asservissement subis par les gens de rien ou de peu. L’appauvrissement n’opère pas seulement sur le plan salarial. Il travaille aussi en profondeur les domaines intellectuels, culturels, éducatifs, professionnels, sociaux, politiques, et touche aussi bien la santé, la représentation démocratique que les medias. Quelle est la réalité de cette inégalité généralisée ? Comment fonctionne le Silence aux pauvres en 2024 ?

Ces questions forment le thème central de notre prochain colloque prévu à l’automne 2025.
Il s’agit d’un important sujet de pleine actualité, dont les domaines d’investigation sont très vastes, riches et nombreux. Nous y travaillons d’arrache-neurones et ne manquerons pas de vous informer de l’avancée de nos travaux.

Complément n° 1

Au delà du 14 juillet, parler de la Révolution, impose de rappeler deux autres ouvrages importants d’Henri Guillemin.

Le premier, incontournable, s’intitule 1789-1792 / 1792-1794 : Les deux Révolutions françaises. Indispensable complément à Silence aux pauvres, il s’agit des textes d’une série de conférences données à la Radiotélévision belge en 1967.
Pour Henri Guillemin, en 1789, on assiste à une révolution des gens de bien, qui doit permettre à la bourgeoisie d’affaires d’accéder au pouvoir, quitte à le partager avec l’aristocratie dans le respect d’un certain ordre social. La vraie Révolution, populaire, qui se préoccupe réellement des classes pauvres, du Quart Etat, restait à venir. Elle aura vécu de 1792 à 1794 et sera liquidée avec la mort de Robespierre. C’est donc de ces deux Révolutions françaises que traite ici Henri Guillemin, en bousculant singulièrement les idées reçues. Pour en savoir plus, cliquez ici.

Le deuxième, tout aussi essentiel est Robespierre politique et mystique. Pour en savoir plus, cliquez ici

En continuant avec Robespierre, le premier et le plus jeune Homme d’État que la France ait connu, le troisième ouvrage que nous proposons est Robespierre et la république sociale d’Albert Matthiez.
Il s’agit d’un recueil présenté par Yannick Bosc et Florence Gauthier, historiens, spécialistes de la Révolution française.

Couverture. 400 pages, janvier 2024 ; 28 €

Albert Mathiez demeure un des plus grands historiens de la Révolution française. Son œuvre, fondée sur une vaste connaissance des archives et une grande perspicacité d’analyse a profondément renouvelé la compréhension de la Révolution. De par ces qualités, ses écrits ont traversé les décennies et demeurent des lectures importantes pour comprendre cette période de bouleversements majeurs.

Dans ce livre, les historiens Florence Gauthier et Yannick Bosc ont réuni et présentent les textes de Mathiez sur Robespierre. Alliant une passion communicative pour l’histoire à une méthode rigoureuse, ces textes forment une biographie politique de Robespierre qui nous plonge, au fil des événements, au cœur de l’action et des réflexions de l’Incorruptible.

Détricotant les légendes noires, Mathiez s’attache à l’étude des sources et met en lumière la proximité de Robespierre avec le mouvement des Sans-culottes, moteur de la Révolution. Porteurs d’une véritable politique sociale, privilégiant le pouvoir législatif contre l’exécutif, le droit à l’existence contre la propriété privée, Robespierre et ses amis de la Montagne ne concevaient la république que démocratique et sociale.

Et terminons par le rappel de notre colloque Colloque Henri Guillemin et la Révolution française, le moment Robespierre le 26 octobre 2013 dont les vidéos des interventions (dont celles de Florence Gauthier et Yannick Bosc) sont toujours disponibles sur notre site (en cliquant ici) et dont les actes sont toujours en vente (cliquez)

Complément n° 2

Parmi les nombreux acteurs de la pensée critique et les multiples vecteurs d’informations alternatives, hors du courant mainstream, Olivier Berruyer est une personne connue pour l’exemplarité du site d’information géopolitique Les crises, qu’il a créé en 2011. De formation en économie financière, il est aussi et surtout un très grand admirateur d’Henri Guillemin.

Le 4 mai 2012, pour célébrer les 30 ans de la disparition d’Henri Guillemin, Olivier Berruyer lui rendait hommage en mettant en ligne les 15 conférences vidéo sur la Révolution française.

Une heureuse initiative quand on sait que ces vidéos ne sont pas facilement disponibles sur le Net, du moins dans l’ordre chronologique de leur parution et de bonne qualité technique.

Pour les écouter et regarder Guillemin, cliquez ici.

Le refus de se laisser monter sur la cervelle

Expression d’Henri Guillemin, titre d’un article publié dans La Tribune de Genève le 16 octobre 1968. Article repris dans le recueil : De l’Histoire et de la Littérature – sélection d’articles 1964-1974 Edité chez Utovie (pour en savoir plus, cliquez ici)

Ce 14 juillet correspond aussi aussi pour nous à une suspension temporaire de nos travaux pour raisons estivales. Qui dit vacances, dit plus grande disponibilité, nouvelles curiosités, état d’esprit différent. Comme l’année dernière, cette rubrique propose un choix d’ouvrages qui nous ont semblé utiles, enrichissants, ou encore dépaysants ; en tous cas, éligibles au bonheur de lecture.

Il fallait bien choisir, trier, prioriser, alors voici notre sélection.

Il est très rare de réussir à traiter un sujet politique, voire géopolitique en littérature, celle de haute qualité romanesque, ouvrant plein large sur l’imaginaire, tout en exploitant les trésors du vocabulaire et de la syntaxe. C’est la réussite de l’écrivain autrichien Robert Ménasse avec deux ouvrages formant les deux premiers volets d’un prochain triptyque.

Couverture. Editions Verdier. 448 pages. 28 €. Existe en format poche même éditeur

Dans La capitale, le lecteur est entraîné au coeur de la commission de Bruxelles, dépeinte de façon hallucinante, satirique, politique, à travers plusieurs destinées et différents complots et intrigues qui vont se croiser, se heurter et dévoiler les coulisses de cette bureaucratie kafkaïenne.

Couverture. Editions Verdier. 608 pages. 26, 50 €

Dans L’élargissement, sur le même ton sarcastique et d’humour noir, on est embarqué dans une épopée burlesque, façon parfois grand guignol, une traversée d’intrigues en tout genre  : l’entrée de l’Albanie dans l’UE. Le talent de Ménasse est d’arriver à nous convaincre que ce qu’il décrit a toutes les chances d’être vrai et de se réaliser. Impossible de poser le bouquin.

Emmanuel Todd est connu. Ses ouvrages également. Mais avec son dernier opus, La défaite de l’Occident, il pulvérise avec une certaine jubilation (on sent à la lecture que c’est lui qui a écrit et non un stagiaire, et on ressent très bien son plaisir), tout le fatras des idées reçues et autres contrevérités, voire absurdités, actuellement diffusées au sujet de la Russie, de l’Europe, des Etats-Unis et du conflit en Ukraine. A sa façon, en démographe, il tord aussi fortement le cou aux récits d’enfumage que Guillemin l’a fait en Histoire littéraire et politique.

Couverture. Editions Gallimard. 384 pages. 23 €

Parce que La Commune fait partie de nos travaux, parce que Guillemin l’a admirablement traitée dans sa série de conférences vidéo, parce qu’on pense à l’ami qui a travaillé cette période historique avec une passion « guilleminienne » durant toute sa vie, parce qu’on a aimé, on propose :

Souvenirs d’une morte vivante: Une femme dans la commune de 1871 de Victorine Brocher.

Couverture. Editions Libertalia. 350 pages. 10 €

Publié en 1909, ce texte de Victorine Brocher (1839-1921) est l’un des rares et forts témoignages de femme du peuple, issue d’une famille militante, ayant traversé les insurrections de 1848 et de 1871. Ambulancière pendant la Commune, elle relate en une langue simple des événements vécus dans sa chair : le Second Empire, le siège de Paris, les privations, la mort de ses enfants, les espoirs nés avec la République sociale, la Semaine sanglante, l’exil et la survie enfin.

C’est exactement le genre d’ouvrage qui émeut, secoue et laisse intranquille car on sait que cette vie est actuellement vécue par des millions de personnes.

Et si nous passions à la fiction.

Couverture. Editions Gallmeister. 248 pages. 6 €

Les éditions Gallmeister ont eu la géniale idée de rééditer Nuit mère de l’écrivain américain Kurt Vonnegut. Méconnu en Europe, et tout particulièrement en France, Kurt Vonnegut est un auteur inclassable, iconoclaste, à l’humour noir ravageur. D’une très grande richesse romanesque, ses romans dressent un portrait sans concession de l’Amérique. On pourrait dire que sa vie est un roman. En tout cas, la seconde guerre mondiale l’aura marqué à jamais et déterminé son style inclassable.
Le 14 décembre 1944, durant la bataille des Ardennes, il se perd derrière les lignes allemandes et est fait prisonnier. En février 1945, il travaille à Dresde comme prisonnier quand, du 13 au 15 février, la ville est sauvagement bombardée au phosphore par les Anglais (10 000 tonnes de bombes), créant une fournaise plus forte que celle d’Hiroshima. Enfoui dans un abattoir, il en réchappe avec six autres prisonniers. Cette tranche de vie sera le sujet de son célèbre roman Abattoir 5 ou la Croisade des enfants.

« Je suis américain de naissance, nazi de réputation et apatride par inclination. » Ainsi commence Nuit mère, histoire d’un américain travaillant en Allemagne sous le 3eme Reich à la radio pour la propagande et qui attend d’être jugé pour crimes de guerre dans une cellule de Jérusalem. Il clame son innocence car il était en fait un agent infiltré chez les nazis au service des Alliés. Et personne ne le croit. Histoire caustique, pleine de vérités tragiques sur la guerre, balancées avec un humour noir corrosif.

La cloche de détresse de Sylvia Plath

Couverture. Editions Denoel. 320 pages. 19,90 €

Un des rares romans de la célèbre poétesse américaine. D’inspiration fortement autobiographique, l’histoire raconte l’errance d’une jeune de fille Esther Greenwood, dix-neuf ans, dans le New York des années 50. En réalité, il s’agit de la première dépression de Sylvia Plath qui raconte avec une extrême sensibilité sa vie, son enfance, son adolescence d’étudiante américaine, ses amours et ses déceptions. C’est aussi une peinture de l’Amérique sous Eisenhower, coincée et puritaine, montrant de façon à la fois douce et imparable, la position sociale de la femme dans le système patriarcal de l’époque.

Hollywood, années rouges de Maurice Nikos

Couverture. Editions du Canoë. 288 pages. 22 €

Un thriller ? Non. Un polar ? Peut-être. Disons un roman policier politique et historique.

Harvey est scénariste, en partance pour Hollywood. Seul hic : il est communiste. Et en 1951, la chasse aux sorcières bat son plein. Le héros s’en aperçoit vite, lui qui retrouve à Los Angeles son frère, scénariste à succès qui se sent épié. Devenu détective amateur, il est mêlé à une intrigue où gravitent un psy affilié au FBI, des militants délateurs… et Sue dont il s’entichera au cours d’une éducation sentimentale et politique. La façon dont l’auteur nous entraîne dans les USA des années 50 tient du tour de force, à travers une galerie de personnages hauts en couleur et par un style aussi comique que trépidant.

On peut constater, avec Sylvia Plath, et Kurt Vonnegut que décidemment, l’Amérique d’après-guerre était très étrangère à la représentation idyllique que s’en sont fait les Européens jusqu’à aujourd’hui.

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Nos travaux s’arrêtent aujourd’hui pour reprendre en septembre. Nous parlerons alors du prochain colloque et des autres sujets que Les Amis d’Henri Guillemin ont a coeur d’évoquer.

D’ici-là, nous vous souhaitons les vacances les plus agréables possibles et de très bons moments de lecture.

A bientôt.

L’équipe de LAHG

Révolution ou autoportrait en combattante palestinienne – 2019 – Tableau de Malak Mattar, peintre palestinienne née le 17 décembre 1999 à Gaza.